mercredi 10 avril 2019

Greguería n° 12

" A veces el abrelibros no marcha porque ha tropezado con el nudo de la novela."
" Quelquefois, parce qu' il bute sur le noeud du roman, le coupe-papier ne coupe pas. "

lundi 8 avril 2019

Greguería n° 10

" Al oir que dice el bruto : " Yo solo me he hecho a mí mismo ", pensamos en lo mal escultor que ha sido."
" En entendant l'imbécile dire : " Je me suis fait tout seul ", nous pensons au mauvais sculpteur qu'il a été."

dimanche 7 avril 2019

Greguería n° 9, sceptique.

" Frente al "yo" y al "superyo" está el "qué sé yo". "
" Face au " moi " et au " surmoi " se trouve le " que sais-je, moi ". "

samedi 6 avril 2019

Greguería n° 8, pythagoricienne.


 ,
" Las parejas de cisnes parecen que señalan siempre una misma cifra, el 22 ; pero a veces, cuando uno de ellos está entrado en el agua y el otro está en pie, a la orilla, señalan el 24."
" Les couples de cygnes semblent indiquer toujours un même chiffre, le 22 ; mais quelquefois, quand l'un d'eux est entré dans l'eau et que l'autre est debout, sur la rive, ils indiquent le 24."

vendredi 5 avril 2019

Greguería n° 7


" La arquitectura árabe es el agrandamiento del ojo de la cerradura. "
" L'architecture arabe est l'agrandissement du trou de la serrure. "

jeudi 4 avril 2019

mercredi 3 avril 2019

Greguería n° 5

" No gozamos bien el canto del ruiseñor, porque siempre dudamos de que sea el ruiseñor."
" Nous ne jouissons pas bien du chant du rossignol, parce que nous ne sommes jamais sûrs que ce soit le rossignol."

Commentaires

1. Le vendredi 5 avril 2019, 11:47 par Arnaud
Écho de Kant, §42 de La critique de la faculté de juger (De l'intérêt intellectuel concernant le beau) : cf. le jeune espiègle caché dans un buisson qui imite à la perfection le chant d'un rossignol...
Ah ! ces maudits imitateurs qui vous gâchent le plaisir !
2. Le vendredi 5 avril 2019, 16:29 par Philalethe
Judicieux rapprochement ! Vous enrichissez ma lecture de ce texte car, en lisant cette greguería, j'ai pensé à autre chose : que l'incertitude vient de ce qu'on ne sait pas si c'est vraiment un rossignol ou un autre oiseau. Inquiet de bien classer ce chant éphémère, on ne peut pas se concentrer sur sa beauté. Peut-être qu'en termes kantiens on peut dire que, soucieux de la beauté adhérente, on perd de vue la beauté libre...
3. Le dimanche 7 avril 2019, 22:45 par gerardgrig
Il me semble que le livre célèbre de Marcel Moré, "Le dieu Mozart et le monde des oiseaux" abonde dans ce sens. Quand on a entendu les chants d'oiseaux dans la musique de Mozart, qui fait plus que les imiter, en les "transfigurant" et en leur donnant des "âmes", on se demande si l'oiseau que l'on entend dans la nature ne chante pas du Mozart.
4. Le lundi 8 avril 2019, 21:01 par Philalethe
Dans le cas que vous évoquez, celui de l'esthète qui perçoit la nature à travers les oeuvres qu'elle a inspirées, l'incertitude est vraiment feinte. Mais pourquoi pas ? Ces greguerías invitent souvent à la pluralité des interprétations.

mardi 2 avril 2019

Greguería n° 4, proustienne.

" El que está en Venecia es el engañado que cree estar en Venecia. El que sueña con Venecia es el que está en Venecia. "
" Celui qui est à Venise, il se trompe, du fait de croire être à Venise. C'est celui qui rêve à Venise qui est à Venise."

lundi 1 avril 2019

Un fait n'est pas un agneau.

Le journal espagnol El Pais a publié le 29 Mars un entretien avec Bruno Latour. J'en extrais un passage :
" P. ¿Los hechos no existen independientemente de estos mundos ?
R. Los hechos hay que sostenerlos, no viven solos. Un hecho solo es un cordero frente a los lobos.
P. ¿Quiénes son los lobos?
R. Los que devoran los hechos. Un hecho debe estar instalado en un paisaje, sostenido por costumbres de pensamiento, hacen falta instrumentos e instituciones."
Selon ma traduction, au risque de ne pas rendre exactement la formulation originale :
" Question : les faits n'existent-ils pas indépendamment de ces mondes (Latour a dit avant que désormais les gens vivent sur des planètes différentes et que le monde commun, réel est perdu) ?
Réponse : les faits, il faut les soutenir, ils ne vivent pas seuls. Un fait seul est un agneau face aux loups.
Q. : qui sont les loups ?
R. : ceux qui dévorent les faits. Un fait doit être installé dans un paysage, soutenu par des habitudes de pensée, il faut des instruments et des institutions."
On se rappelle que dans La généalogie de la morale (I, 13), Nietzsche prend l'agneau comme symbole de l'homme du ressentiment. Ce sont les oiseaux de proie qui y tiennent le rôle du loup. Certes dans le texte nietzschéen l'agneau va gagner mais au mépris de la vérité, séparant la force de ses manifestations, inventant le libre-arbitre et la culpabilité imaginaire des oiseaux de proie. Le fait a donc tout à craindre pour sa force à lui de se retrouver, dans la bouche de Latour, incarné dans la peau de l'agneau...
En effet comparer le fait à un vivant fragile pousse à le voir, sinon comme une création, du moins comme le produit d'une culture. Manifestement Latour regrette la disparition d'une culture commune (à mon avis il a bien contribué à cette disparition en jetant le doute sur la réalité de la réalité...), mais les hommes peuvent-ils parvenir à reconnaître des vérités factuelles objectives si les faits ont réellement la fragilité du vivant ? S'il faut choisir une métaphore, alors je prendrai plutôt le rocher, car les faits résistent au temps, on se heurte à eux, etc. Ce qui dépend de la culture n'est pas le fait, mais la connaissance du fait. Si la culture ne donne pas de bonnes habitudes épistémiques, on peut passer à côté des faits, ne pas les comprendre, les défigurer etc.
C'est un fait que Bruno Latour a eu un entretien avec un journaliste de El Pais. Je ne sais pas si c'est un fait important ; certes on pourra l'oublier, mais le faire disparaître est absolument impossible.

dimanche 31 mars 2019

Greguería n° 3

Le journal espagnol El Pais a publié le 29 Mars un entretien avec Bruno Latour. J'en extrais un passage :
" P. ¿Los hechos no existen independientemente de estos mundos ?
R. Los hechos hay que sostenerlos, no viven solos. Un hecho solo es un cordero frente a los lobos.
P. ¿Quiénes son los lobos?
R. Los que devoran los hechos. Un hecho debe estar instalado en un paisaje, sostenido por costumbres de pensamiento, hacen falta instrumentos e instituciones."
Selon ma traduction, au risque de ne pas rendre exactement la formulation originale :
" Question : les faits n'existent-ils pas indépendamment de ces mondes (Latour a dit avant que désormais les gens vivent sur des planètes différentes et que le monde commun, réel est perdu) ?
Réponse : les faits, il faut les soutenir, ils ne vivent pas seuls. Un fait seul est un agneau face aux loups.
Q. : qui sont les loups ?
R. : ceux qui dévorent les faits. Un fait doit être installé dans un paysage, soutenu par des habitudes de pensée, il faut des instruments et des institutions."
On se rappelle que dans La généalogie de la morale (I, 13), Nietzsche prend l'agneau comme symbole de l'homme du ressentiment. Ce sont les oiseaux de proie qui y tiennent le rôle du loup. Certes dans le texte nietzschéen l'agneau va gagner mais au mépris de la vérité, séparant la force de ses manifestations, inventant le libre-arbitre et la culpabilité imaginaire des oiseaux de proie. Le fait a donc tout à craindre pour sa force à lui de se retrouver, dans la bouche de Latour, incarné dans la peau de l'agneau...
En effet comparer le fait à un vivant fragile pousse à le voir, sinon comme une création, du moins comme le produit d'une culture. Manifestement Latour regrette la disparition d'une culture commune (à mon avis il a bien contribué à cette disparition en jetant le doute sur la réalité de la réalité...), mais les hommes peuvent-ils parvenir à reconnaître des vérités factuelles objectives si les faits ont réellement la fragilité du vivant ? S'il faut choisir une métaphore, alors je prendrai plutôt le rocher, car les faits résistent au temps, on se heurte à eux, etc. Ce qui dépend de la culture n'est pas le fait, mais la connaissance du fait. Si la culture ne donne pas de bonnes habitudes épistémiques, on peut passer à côté des faits, ne pas les comprendre, les défigurer etc.
C'est un fait que Bruno Latour a eu un entretien avec un journaliste de El Pais. Je ne sais pas si c'est un fait important ; certes on pourra l'oublier, mais le faire disparaître est absolument impossible.