lundi 22 avril 2019

Greguería n° 21.

" ¿ No os dice nada el que tantos grandes hombres hayan muerto ? A mi me dice más que lo que ellos dijeron en vida."
" Ça ne vous dit rien que tant de grands hommes soient morts ? À moi ça me dit plus que ce qu'ils ont dit de leur vivant."

dimanche 21 avril 2019

Greguería n° 20 : rareté du génie, banalité du modèle.

20
" Laura sigue saliendo de misa bella y joven todos los domingos. Quien desaparacío fut el Petrarca."
" Laura continue de sortir de la messe, belle et jeune, chaque dimanche. Celui qui a disparu est Pétrarque."

Commentaires

1. Le lundi 22 avril 2019, 14:16 par gerardgrig
L'Université de Pittsburgh possède les "Gregues" de Ramón, qui sont ses "greguerias intimes". Il s'agit de sa bibliothèque de travail, un trésor de citations. Elle comprend des fiches cartonnées et des coupures de presse, en abondance, car Ramón avait une formation journalistique. On apprend que ses maîtres antiques en gregueria étaient Euripide, Horace et Ovide. Il prenait aussi des citations chez les auteurs du Siècle d’or (Góngora, Quevedo et Gracián), ses prédécesseurs, ou dans la littérature des avant-gardes (Breton et les surréalistes, García Lorca, etc.). Il reconnaissait Cernuda et Neruda comme des continuateurs de l'art de la gregueria. Néanmoins, on voit aussi que tout écrit l' intéressait, parce qu'il pouvait l'aider à résumer la vie par une citation, et mettre un peu la vie entre parenthèses. La gregueria des deux pelles, ces superbes parenthèses symboliques qui font disparaître une vie d'homme dans le néant, est éclairante pour cela. Cette hantise de la littérature s'élargissait même, en rendant inutile la citation écrite. La jeune et belle Italienne sortant d'une église semblait citer Pétrarque, par son geste, et changer de prénom.
2. Le lundi 22 avril 2019, 17:26 par Philalèthe
Merci beaucoup de nourrir mon afición a Ramón !

samedi 20 avril 2019

Greguería n° 19 ou quand la moraline devient pathologique.

" Era tan moral que perseguía las conjunciones copulativas."
" Il était si moral qu'il faisait la chasse aux copules."
Traduction un peu infidèle car las conjunciones copulativas sont les conjonctions de coordination.
En tout cas, le malade de la moraline avec la suppression de la copule aura plus de difficultés à se faire comprendre que el perseguidor de las conjunciones copulativas qui saura conjoindre sans les immorales conjonctions.

vendredi 19 avril 2019

Greguería n° 18, intraduisible.

" Cenobita : uno que cenar evita."
Savoir qu'en espagnol, le b et le v se confondent dans la prononciation.

mercredi 17 avril 2019

Greguería n° 17, sine grano salis.

" Monologo quiere decir el mono que habla solo"
Cette greguería est traduisible mais perd beaucoup de son sel dans l'opération : " Monologue veut dire singe qui parle tout seul "
Dans la même veine, " monomaníaco : mono con manías " ( " monomaniaque : singe à manies ")

mardi 16 avril 2019

lundi 15 avril 2019

Greguería n° 15, païenne.


" El deseo del rayo es plantar en el suelo un arbol electrico. "
" Le désir de la foudre est de planter dans le sol un arbre électrique."

dimanche 14 avril 2019

Une greguería pascalienne ?

Dans le prologue de Total de greguerías, Ramón mentionne le fait qu'il a trouvé des greguerías chez des auteurs anciens. Entre autres il cite, en l'abrégeant, une pensée de Pascal : " Los ríos son caminos que andan ". Le texte original, lui, dit : " Les rivières sont des chemins qui marchent et qui portent où l'on veut aller." Rien d'étonnant en effet que Ramón ait trouvé les deux ingrédients de la greguería : métaphore et humour.
Greguería, ce mot que Valéry Larbaud et Mathilde Pomès ont traduit par criaillerie, nom qu'ils ont donné en le mettant au pluriel à un des 6 chapitres des Échantillons, extraits de l'oeuvre de Ramón, publiés par eux en 1923 chez B. Grasset. D'après Rodolfo Cardona dans son édition des Greguerías (Cátedra, Madrid, 2014), ce sont les seuls traducteurs à avoir proposé une traduction du mot, malheureuse à mes yeux. Le mot vient de griego (grec), voulant dire ici langage incompréhensible, comme le précise le dictionnaire de la Real Academia Española. Si on peut le remplacer, en dehors du contexte ramonien, par griteria que rend bien lui criaillerie, c'est parce qu'on peut ne rien comprendre quand quelqu'un crie très fort. Il semble donc plus fidèle à l'intention de Ramón de laisser en français le mot d'origine, incompréhensible pour qui n'entend pas l'espagnol. L'espagnol cultivé, lui, comprend immédiatement ce mot comme voulant dire invention littéraire de Ramón Gómez de la Serna.
Le plaisir est bien sûr de chercher à rendre intelligible l' hébreu de Ramón. Quant à la phrase de Pascal, l'édtion de Le Guern la laisse sans note. En revanche, dans son édition des Pensées, le grand Léon Brunschvicg fait un rapprochement intéressant avec Rabelais. Voici la notule pour qui n'a pas la chance d'avoir sous la main l'édition en question :
" Il semble qu'il y ait là un souvenir d'un chapitre de Rabelais : Comment nous descendimes en l'isle d'Odes, en laquelle les chemins cheminent.... Puys se guindans au chemin opportun, sans aultrement se poiner ou fatiguer, se trouvoyent au lieu destiné ; comme vous voyez advenir à ceulx qui de Lyon ou Avignon et Arles se mettent en bateau sur le Rhosne,..." Cette pensée n'est-elle dans Pascal qu'une remarque isolée et sans portée ? Ou ne devrait-elle pas servir à titre de comparaison pour mieux faire entendre sa conception de l'éloquence ? Le discours est en effet pour Pascal un chemin qui marche et qui porte l'esprit à la conclusion où l'on tend." (Hachette, 1922, p.327)
Les greguerías de Ramón, elles, sont loin d'être toujours des chemins qui portent l' esprit à la conclusion où veut conduire leur auteur (pas sûr d'ailleurs qu'il ait toujours eu une conclusion à transmettre). Déconcerter, provisoirement ou non, était son intention.
Vu que la phrase de Pascal étonne aussi, certes moins par son sens que par sa fonction dans les Pensées, il était donc sensé de la part de Ramón de la voir comme une greguería.

Commentaires

1. Le lundi 15 avril 2019, 17:53 par gerardgrig
Si Ramón a détecté au moins une gregueria pascalienne, Lautréamont, dans ses "Poésies", a malmené les "Pensées" de Pascal d'une manière qui a eu un résultat très inquiétant. Si Lautréamont y a réussi aussi bien, c'est parce qu'il y a peut-être un surréalisme ou un "greguerianisme" potentiel dans les "Pensées" de Pascal. Quand Lautréamont écrit "Si la morale de Cléopâtre eût été moins courte, la face du monde aurait changé. Son nez n’en serait pas devenu plus long." (II-22), il ne fait qu'accentuer notre étonnement quand on découvre cette maxime de l'effet-papillon, à base de "long" nez. Pascal aurait dû écrire "Le nez de Cléopâtre, s'il eût été moins grec...". J'avoue que j'ai éclaté de rire, la première fois. Le "surréalisme" de Pascal est là. Il écrivait pour une élite éternelle, mais ses "Pensées" étaient lues par des lycéens pour qui le petit nez en trompette des filles était le canon suprême de la beauté féminine.
2. Le mercredi 17 avril 2019, 18:26 par Philalethe
Oui, Lautréamont parodie aussi La Rochefoucault et Vauvenargues, que j'ai aimé moi simplement commenter, à défaut d'avoir le talent de les retourner. 
Quant au surréalisme de Pascal, je l'interpréterai seulement métaphysiquement, comme synonyme de son surnaturalisme. Bourdieu a essayé de garder l'essentiel du pascalisme en extrayant réalisme et naturalisme de l'ensemble surnaturel de ses pensées. 

samedi 13 avril 2019

Greguería n° 14

" La pala es la primera y la última amiga del hombre, primero en la arena de los juegos infantiles y por fin descansando sobre el último montículo en el cementerio."
" La pelle est la première et la dernière amie de l'homme, d'abord sur le sable avec les jeux d'enfants et enfin reposant sur le dernier tas, au cimetière."

jeudi 11 avril 2019

Greguería n° 11

" Queremos ser de piedra y somos de gelatina."
" Nous voulons être de pierre et nous sommes en gélatine."