vendredi 31 mai 2019

Greguería n° 54

" Aquel director de Zoológico hizo barnizar a todos los animales y le salió el primer día de la creación."
" Un directeur de zoo fit vernir tous les animaux : ce fut alors le premier jour de la création."

Commentaires

1. Le samedi 1 juin 2019, 11:55 par gerardgrig
Il est assez facile de faire un commencement de monde, en déménageant un zoo, par exemple. Cela pourrait inciter à douter des textes religieux, et poser le problème du conflit de la raison et de la foi. Il y a des explications rationnelles des textes religieux. Celle du Buisson ardent est parfaitement scientifique. Dans le cas de la Genèse, l'explication rationnelle reste toujours théologique. Le moyen s'y échapper est l'ironie voltairienne.
2. Le samedi 1 juin 2019, 15:10 par Philalethe
Quand j'ai lu cette greguería, j'ai immédiatement pensé au musée créationniste américain ! https://arkencounter.com/

jeudi 30 mai 2019

Greguería n° 53

" Los ojos negros nos permitirán penetrar en ellos, pero los azules nos tendrán siempre a la puerta."
" Les yeux noirs nous permettront toujours de pénétrer en eux, mais les yeux bleus nous laisseront toujours sur le seuil."

mercredi 29 mai 2019

Greguería n° 52

" El ciervo es el hijo del rayo y del árbol."
" Le cerf est le fils de la foudre et de l'arbre."

mardi 28 mai 2019

Greguería n° 51

" El capullo comienza como un corazón, y acaba estallando como un aneurisma. "
" Le bourgeon commence comme un coeur et finit en éclatant comme un anévrisme. "

Commentaires

1. Le mercredi 29 mai 2019, 18:17 par gerardgrig
Cette gregueria est assez flaubertienne. À la poésie bucolique, elle mêle une angoisse sur sa fin, de rentier instruit des choses de la médecine. On pense à Bouvard et à Pécuchet. Mais Ramón évoque un accident généralement associé à des parties nobles du corps. Il n'évoque pas les infections purulentes de parties plus prosaïques.

lundi 27 mai 2019

Greguería n° 50


" La B es el ama de cría del alfabeto."
" Le B est la nourrice de l'alphabet."

Commentaires

1. Le samedi 1 juin 2019, 17:25 par gerardgrig
Ramón était un peu kabbaliste et numérologue. Il s'intéressait à la magie et à la superstition de la culture méditerranéenne. Il y a un côté para-normal, métapsychique, dans les greguerias, parce qu'elles nous font entrer dans d'autres dimensions. Ici Ramón livre une bribe d'abécédaire Le B représente les deux seins de la nourrice. Il me semble que le Beith de la Kabbale va dans ce sens, avec la nourrice en moins.
2. Le lundi 3 juin 2019, 16:47 par gerardgrig
Ramón aurait pu être soupçonné de marranisme par l'Inquisition, comme Cervantes et Thérèse d'Avila. L'Inquisition était encore active à l'époque de Goya. Il y a un tableau de lui, "Autodafé de l'Inquisition".
3. Le lundi 10 juin 2019, 11:24 par Philalethe
Il voit les majuscules comme des hiéroglyphes.

dimanche 26 mai 2019

Greguería n° 49


" El Cid se hacía un nudo en la barba para acordarse de los que tenía que desafiar."
" Le Cid se faisait un noeud à la barbe pour se rappeler de ceux qu'il devait défier."

vendredi 24 mai 2019

Greguería n° 47

" Lo mas terrible del atropello es que el grito lo da el freno mientras enmudece la victima."
" Le plus terrible quand quelqu'un se fait renverser, c'est que le cri est celui du frein, au moment même où la victime est rendue muette."

Commentaires

1. Le samedi 25 mai 2019, 09:45 par pang lescale
Gregueria N° 48
" la imitacion es un arte culinario"
2. Le mardi 28 mai 2019, 16:32 par gerardgrig
Il y a peut-être une influence du cinéma dans cette gregueria. On dirait un montage qui joue sur le décalage entre l'image et le son. Il y a aussi comme un souvenir de la pataphysique du piéton écraseur. C'est le piéton qui tombe, mais c'est le véhicule qui souffre et qui crie.
3. Le jeudi 30 mai 2019, 16:34 par Philalethe
à Pang Lescale
Je fais la cuisine que je peux... J'espère que vous imitiez l'original agacé...

jeudi 23 mai 2019

Greguería n° 46

" Galgos son tuberculosos que corren."
" Les lévriers sont des tuberculeux qui courent."

mercredi 22 mai 2019

Greguería n° 45

" Cuando con la pluma se hace un enredijo de líneas sale una masa encefálica. "
" Quand avec la plume on fait un enchevêtrement de lignes, apparaît une masse encéphalique."

Commentaires

1. Le mercredi 22 mai 2019, 17:00 par gerardgrig
C'est par son œuvre de peintre que l'histologiste et neuroscientifique Santiago Ramón y Cajal découvrit les neurones, avec axones et dendrites, et les synapses. À l'origine, il peignait des coupes de cervelles de mouton, auxquelles il trouvait un grand intérêt artistique. D'un point de vue épistémique, on peut parler de sérendipité. Néanmoins, dans sa gregueria, Ramón évoque plutôt une forme de dessin automatique, comme il y a une écriture automatique. Pourtant, le fait que la main dessine spontanément ce qui ressemble à un cerveau pourrait intéresser les neurosciences.

mardi 21 mai 2019

Comment traduire greguería ?

Dans sa présentation des '' Échantillons '' (1923), où, avec Mathilde Pomès, Valéry Larbaud publie des extraits d' oeuvres de Ramón, l' écrivain français expose longuement la difficulté rencontrée au moment de traduire le mot désignant la forme littéraire, poétique rendue célèbre par Gómez de la Serna, c'est-à-dire la greguería :
" " L'objet et le son qu'il rend en nous " ; c'est ainsi que je traduis une de ses expressions familières : " El objeto y su greguería ". Et cela m'amène à parler de la difficulté que présente la traduction de ce mot " greguería " qui revient si souvent dans les livres de R. Gómez de la Serna, qui sert de titre à un des plus importants, et par lequel il désigne ce genre d'épigrammes sans pointe, de haï-kaïs en prose, cette forme qu'il a faite sienne. Il avait d'abord songé à d'autres mots, dont la traduction est facile en français ; dans ses premiers livres, nous trouvons des " Moments ", des " Regards ", des " Ressemblances ". Mais il ne fut satisfait que lorsqu'il eût rencontré ce terme plus précis de " greguería ". " Cris confus, clameurs dont on ne saisit pas l'articulation " dit le dictionnaire de Salva. " Brouhaha ", dit celui de Darbas et Igon. " Criaillerie ", dit celui de Bustamante. Les dictionnaires espagnols disent : " Rumeur confuse et soudaine ", et donnent en exemple : " la greguería des enfants qui sortent de l' école ", " la greguería des perroquets dans une forêt tropicale " etc. Le mot français " rumeur " tel que le définit Littré (" bruit qui s'élève tout à coup ") en serait une version assez convenable, mais il a d'autres sens, propres et figurés, qui obscurcissent celui-là. Nous avons songé à " ramage », " jacasserie ", " piaillerie ", et dans une note à quelques morceaux traduits par Mme B. Moreno, M. Latour-Maubergeon et moi (les premiers traduits en France) et publiés dans la revue " Hispania ", M. Ventura Garcia Calderón proposait le mot " algarade ". Il y eut à ce propos un article dans un journal de Madrid, dont la conclusion était qu' aucun des mots français proposés n´ était l'équivalent exact de " greguería ". Nous avons maintenu, faute de mieux, le premier choisi, " criaillerie ", qui a l'avantage d'avoir le même nombre de syllabes et une certaine ressemblance de son avec " gregueria ". Mais c'est une " criaillerie " dont il faut exclure toute idée de mécontentement ou d'aigreur ; une criaillerie intérieure, psychique, la haute et brève rumeur que fait en nous la sensation provoquée par l'objet, une criaillerie dont « Je suis odeur de rose » est en quelque sorte l'archétype philosophique." (Grasset, 1923, pp. 16-17)
Dans son édition critique et bilingue des greguerías (Classiques Garnier, janvier 2019), Laurie-Anne Laget a choisi brouhahas comme titre, ce que je ne trouve à vrai dire pas plus heureux que criaillerie. En effet la greguería, qui sait si souvent bien faire voir ce dont elle parle, est trop lucide et éclairante pour être associée aux confusions de la criaillerie et du brouhaha.

Commentaires

1. Le vendredi 14 juin 2019, 16:37 par gnales pecal
pourquoi pas "instantanés" , qui ne rend pas le cri, mais assez bien l'aspect de vision soudaine de chaque gregueria ?
2. Le vendredi 14 juin 2019, 19:02 par Philalethe
Instantané rend l' effet de la greguería sur le lecteur : comme elle est le plus souvent très brève, l'instant que prend sa compréhension change immédiatement la manière de voir ce sur quoi elle porte, mais aussi ce changement peut ne durer qu'un instant ou se répéter par instants.
Oui, bien sûr, on perd la référence au cri et à l'incompréhensible.
En tout cas, si l'on croit le prologue au Total de greguerías, c'est en un instant que Ramón a trouvé le mot en piochant dans le dictionnaire. Ce que le hasard lui a donné, Ramón dit l'avoir gardé " por lo eufónica et por los secretos que  tiene en su sexo." ( " pour son coté euphonique et pour les secrets qu'elle conserve dans son sexe " )