lundi 22 juillet 2019

Greguería n° 93

" La lucha por el micrófono es una lucha escondida pero feroz. Todos quieren hablar por él, cantar su aria, tocar su flauta."
" La lutte pour le microphone est une lutte cachée mais féroce. Tous veulent y parler, chanter leur air, jouer de leur flûte."

Commentaires

1. Le lundi 22 juillet 2019, 14:39 par gerardgrig
Ramón était féru de radio et de cinéma. On le voyait dans la gregueria 82. Il a écrit "Ciné-ville", une parodie chaplinesque et nostalgique d'Hollywood. Ramón a aussi écrit le livret de l'opéra "Charlot". Il aimait le personnage de l'inadapté à la modernité, qui se moque d'elle. Il en faisait une théorie, le charlotisme, dans son autobiographie.
Dans cette gregueria, il n'épargne pas les artistes, victimes de l'attrait des nouveaux médias de la modernité, qui accroissent la compétition sociale.
2. Le vendredi 26 juillet 2019, 16:30 par Philalethe
Oui, Cinelandia est la chronique de son voyage à Hollywood. Je devrais lui consacrer quelques billets.

dimanche 21 juillet 2019

Greguería n° 92

" Atalayar la nada sería asomarse a la ventana de un edificio que nunca estuvo edificado."
" Espionner le néant serait se pencher à la fenêtre d'un édifice qui n'aurait jamais été construit."

samedi 20 juillet 2019

Greguería n° 91

" El amor propio precisamente es lo que más vive de la opinión ajena."
" L'amour-propre est précisément ce qui vit le plus de l'opinion d'autrui."

vendredi 19 juillet 2019

Greguería n° 90

" La ametralladora suena a máquina de escribir de la muerte."
" La mitraillette ressemble à la machine à écrire de la mort."

Commentaires

1. Le dimanche 21 juillet 2019, 13:20 par gerardgrig
Est-ce la mitraillette ou plutôt la mitrailleuse, cette arme qui a bloqué les lignes de front dans une guerre de position décimante, en 14-18 ? Avec l'analogie de la machine à écrire de l'écrivain, Ramón semble être dans la provocation surréaliste autour de la guerre. On pense à Apollinaire et à son "Ah dieu ! que la guerre est jolie". Mais Apollinaire ira plus vite que son rival en fondation du surréalisme, pour épingler Alphonse XIII malade de la grippe espagnole, car il n'aimait que les produits nationaux. La provocation surréaliste, autour de la violence guerrière, fera long feu, quand Dali rapprochera Hitler du Maldoror de Lautréamont. Cela sonnera le glas du surréalisme historique.
2. Le vendredi 26 juillet 2019, 16:33 par Philalethe
C'était l'époque où les armes pouvaient encore être comparées à des objets domestiques ordinaires ! Cette greguería voit l'arme fantastique comme un ustensile ordinaire devenu gigantesque, du coup on pense à Swift :
" El inventor de un abrelatas para los tanques guerreros se haría rico." 
" L'inventeur d'un ouvre-boîtes pour tanks deviendrait riche."

jeudi 18 juillet 2019

Greguería n° 89

" Lo maravilloso es que miramos por los ojos como si no tuviésemos ojos."
" L'étonnant est que nous regardons à travers les yeux comme si nous n'avions pas d' yeux."

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1. Le lundi 22 juillet 2019, 13:55 par gerardgrig
Le lampadaire était aussi lié a la thaumaturgie de Ramón. Dans les années 1920, et jusqu'au milieu des années 1930, il donnait des conférences "greguerizantes". À la fin de l'une d'elles portant sur les lampadaires, un aveugle est venu lui dire que grâce à lui, il les avait vus. Dans l'image, il y a aussi le curieux dessin du visage de Ramón, en double et en surimpression. La signature fait les yeux et le nez.
La bouche est fermée et elle est un trait tremblé. C'est l'organe de la gregueria, qui est avant tout vocale. Que représentent ces nuages, reliés par la bouche, sur les joues ? Sont-ils un maquillage pour le carnaval ? Ramón est bien l'auteur des greguerias, mais il est double, transparent, maquillé, stylisé, et en quelque sorte esthétisé.
2. Le vendredi 26 juillet 2019, 16:48 par Philalethe
Oui c'est une étrange image. Chaque chapitre de Automoribundia étant décoré d'une petite vignette, c'est ce visage que Ramón choisit de présenter au début du premier chapitre racontant sa naissance et commençant par ces mots difficilement traduisibles : Nací, o me nacieron - que no sé cómo hay que decirlo en estricta justicia. Je suis né ou ils me naquirent - je ne sais comment le dire en toute exactitude.
Ramón y explique qu'il est fait pour porter ce prénom, adapté parfaitement à son visage :
Je suis né pour m'appeler Ramón, et je pourrais même dire que j'ai le visage rond et gros de Ramón, digne de ce grand O sur lequel s'appuie le nom, et qui est exalté par son accent que seule l'imprimerie m'escamote parce que les majuscules n'y sont pas accentuées."
Certes c'est étrange qu'alors Ramón n'ait pas accentué le o dans son petit dessin...

Images ramoniennes.

Total de greguerías (Aguilar, Madrid, 1955)

Commentaires

1. Le jeudi 18 juillet 2019, 14:41 par gerardgrig
Dans ces images on voit que le cirque, le carnaval et le music-hall faisaient le décor des greguerias. C'était la Fête ! À gauche, on aperçoit peut-être le Café de Pombo.
2. Le samedi 20 juillet 2019, 12:18 par Philalethe
Oui, mais le réverbère et le double banc inoccupé délimitent aussi un espace solitaire.

mercredi 17 juillet 2019

Greguería n° 88

" Todo se especializa, y un día leeremos : "Encuadernaciones para alérgicos." "
" Tout se spécialise et un jour nous lirons : " Reliures pour allergiques. "

mardi 16 juillet 2019

Greguería n° 87

" Cada vez es mas modesto mi ideal : hoy he cortado las patas a una mesa."
" Chaque fois mon idéal est plus modeste : aujourd'hui j'ai coupé les pieds d'une table."

lundi 15 juillet 2019

Greguería n° 86

" Pensamiento consolador : el gusano también morirá."
" Pensée consolatrice : le ver mourra aussi."

dimanche 14 juillet 2019

Greguería n° 85

" El vanidoso pavo real tiene en la cola un coro de impertinentes de señora."
" Le vaniteux paon royal a sur la queue un choeur composé de faces-à-main de dame."

Commentaires

1. Le samedi 20 juillet 2019, 12:30 par gerardgrig
Les observations de la nature de Ramón ont une force comique. Il humanise la nature à outrance, en la ramenant à son monde limité et daté à lui. Dans le cas du paon, il y a une intention morale ou une critique sociale évidentes, tandis que les faces-à-main des dames évoquent les théâtres et les salons de son temps. La gregueria 51 du bourgeon qui éclot comme une rupture d'anévrisme fait penser à l'angoisse des fêtards des cafés madrilènes, quand ils anticipent leur fin. La gregueria 65 d'histoire naturelle des sauriens primitifs est un jeu de société, celui des ombres chinoises. Et il y a la gregueria spéléologique 63, et la finalité fantaisiste du stalactite. Que signifie cette vision désinvolte et trop distrayante de la science ? Est-ce du scepticisme ? Ramón montre l'ignorance humaine sans fard et il en rit.
2. Le vendredi 26 juillet 2019, 16:50 par Philalethe
Et puis désormais quand les paons me tournent le dos, je me sens encore regardé !