Dans Langages de l'art (p.49 Hachette Littérature), Nelson Goodman écrit:
" La différence entre une image-d'homme et l'image d'un homme est étroitement parallèle à la différence entre une description-d'homme ou un terme-pour-homme et une description et un terme pour homme. "Pickwick", "le duc de Wellington", "l'homme qui a vaincu Napoléon", "un homme replet", "l'homme qui a trois têtes" sont toutes des descriptions-d'homme mais il s'en faut que toutes décrivent un homme. Quelques-unes dénotent un homme particulier, certaines dénotent chacun d'entre une multitude d'hommes, et certaines ne dénotent rien."
Je repense à Diogène Laërce et à ses philosophes illustres. La difficulté de le commenter vient finalement de ce que toute description-de-philosophe faite par lui peut autant dénoter un homme particulier (Diogène de Sinope par exemple) que chacun d'entre une multitude d'hommes (l'homme en tant qu'il a les traits de la secte cynique) ou rien du tout (le cynique comme possibilité seulement pensée mais jamais réalisée).
Commentaires
Mais s'il m'intéresse, c'est en tant qu'il dénote chacun des philosophes d'une secte donnée, le nom propre du philosophe se référant alors à tous les philosophes de la secte en question (dans ces conditions Laërce indiquerait donc des styles de vie envisageables aujourd'hui encore au moins partiellement) et aussi en tant qu'il ne dénote rien du tout (reste que si, contre son gré alors, il ne dénote rien du tout, il ne m'intéresse qu'en tant que cette fiction a pour le moins une dimension d'idéal régulateur: par exemple le stoïcien comme horizon inaccessible mais pas comme mirage, car cet horizon change quelque chose, certes peut-être pas grand-chose, du paysage dans lequel on chemine).
- chacun d'entre une multitude d'hommes (l'homme en tant qu'il a les traits de la secte cynique
Ce point s'explique peut-être par le fait que Diogène Laërce procède à des successions. Socrate maître d'Antisthène maître de Diogène maître de Cratès maître de Zénon... Ainsi pour tenir ses filiations, il va insister sur les homologies (symplésiomorphies, les synapomorphies, apomorphies). Ce qui revient à soutenir (sans utiliser le vocabulaire de la biologie) que Diogène Laërce force sur les resemblances, leur dérive et les évolutions... au point d'inventer ou reprendre des branches imaginaires, par exemple, de poser Antisthène comme fondateur du mouvement cynique.