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vendredi 8 juin 2012

L'immanence des mystiques.

" Les mystiques ont des visions tout à fait semblables aux tableaux des peintres ou aux miniatures des enlumineurs " écrit Émile Mâle en 1908 dans L'art religieux de la fin du Moyen-Âge (Colin, 1925, p. 152).
Tels les Épicuriens, pensant voir, dans leurs rêves, les dieux tels qu'ils sont.

mardi 5 juin 2012

Les Grecs antiques, un peuple de stoïciens, qui ne prenait pas au sérieux toute la nature humaine ?


 Tête de Christ (musée du Louvre)
Dans L'art religieux de la fin du Moyen-Âge (1908), Émile Mâle écrit à propos des Grecs anciens :
" Raconter l'agonie d'un Dieu, montrer un Dieu épuisé, meurtri, couvert d'une sueur de sang, une telle entreprise eût fait reculer les Grecs du Vème siècle. Leur conception héroïque de la vie les rendait peu sympathiques à la douleur. Pour eux, la souffrance, qui détruit l'équilibre du corps et de l'âme est servile ; c'est un désordre que l'art ne doit pas éterniser. Seules, la beauté, la force, la sérénité doivent être proposées à la contemplation des hommes : ainsi l'oeuvre d'art devient bienfaisante, ainsi elle offre à la cité le modèle de la perfection où elle doit tendre. Ce peuple de dieux et de héros de marbre dit au jeune homme : "Sois fort, et, comme nous, domine la vie." Voilà la leçon que donne et donnera sans cesse l'antiquité. Grande leçon, assurément, et qui, depuis la Renaissance, a fait hésiter les âmes. Michel-Ange eut beau être chrétien, il fut subjugué par l'héroïsme antique.
Son Christ de la Minerve, beau comme un athlète, porte la croix comme un triomphateur : nulle trace de souffrance sur son visage impassible. Michel-Ange, comme un Grec, méprise et enseigne à mépriser la douleur. Instruits par son exemple, les Français, vers 1540, commencèrent à avoir honte d'exprimer la souffrance.
Le Christ à la Colonne de Saint-Nicolas de Troyes est un héros que ne sauraient atteindre les outrages des esclaves. L'artiste qui l'a sculpté n'imite pas seulement les procédés de Michel-Ange, il participe à son esprit. Car ce qui rend si dramatique l'histoire de l'art de la Renaissance, en France et dans toute l' Europe, c'est que c'est l'histoire de la lutte de deux principes, de deux conceptions de la vie.
Que voulaient dire nos vieux maîtres ? Ils voulaient dire que la douleur existe et qu'il ne sert à rien de la nier quand on la sent mêlée à la trame des choses. Au fond, ils avaient raison. Une religion, un art, où la douleur n'a pas sa place, n'expriment pas toute la nature humaine. La Grèce, elle-même, lassée de ses belles légendes qui ne consolaient pas, se mit à pleurer avec les femmes de Syrie la mort d' Adonis.
Il faut que les larmes longtemps contenues s'ouvrent un passage." (Colin, 1925, p.95-96)
Terminons par ces lignes de Nietzsche, qui mettent en relief en-deçà de leurs différences la parenté entre l'art hellénique (qu'on me pardonne la grossière généralité...) et l'art gothique :
L'au-delà dans l'art. Ce n'est pas sans un profond chagrin qu'on s'avoue que les artistes de tous les temps, dans leurs aspirations les plus hautes, ont rapporté précisément ces représentations à une transfiguration céleste que nous connaissons aujourd’hui pour fausse : ils sont les glorificateurs des erreurs religieuses et philosophiques de l'humanité, et ils n'auraient pu l'être sans la foi en leur vérité absolue. Or, si la foi en une telle vérité diminue, les couleurs de l'arc-en-ciel pâlissent autour des fins extrêmes de la connaissance et de l'illusion humaine : ainsi cette espèce d'art ne peut plus refleurir, qui, comme la divina commedia, les tableaux de Raphaël, les fresques de Michel-Ange, les cathédrales gothiques, suppose non seulement une signification cosmique, mais encore une signification métaphysique des objets de l'art. Il se fera une émouvante légende de ce qu'il ait pu exister un tel art, une telle foi d'artistes." (Humain, trop humain, I, 220, éd. Lacoste & Le Rider, p.555)
À la différence d' Émile Mâle, Nietzsche inclut le christianisme dans la légende.

lundi 4 juin 2012

Un peintre hegélien ou une image non cartésienne de la jeunesse.

C'est Émile Mâle qui écrit dans L'art religieux de la fin du Moyen-âge en France (Colin, 1925, p.48) :
" Dans l'art italien du XVème siècle, le type de saint-Jean encore enfant, mais déjà visité par l' Esprit, n'est pas rare ; il a inspiré quelques belles oeuvres aux sculpteurs florentins. C'était une entreprise hardie de marquer du sceau de Dieu un front naïf et une bouche candide. Qui ne connaît le jeune visage fiévreux du Saint-Jean de Donatello
Unir l'innocence à la science suprême , un pareil problème a ravi Léonard, sorte de philosophe hegélien, qui réconcilie les contraires dans une harmonie supérieure. Son Saint Jean-Baptiste du Louvre, qui sourit sur un fond de ténèbres, est l'oeuvre la plus étonnante qu'ait inspirée l'enfance du Précurseur."