On peut entendre cette phrase de deux façons : - soit Wittgenstein estimait que Malcolm était tellement nul et non avenu en philosophie que seul un miracle lui permettrait de l'enseigner correctement,
- soit Wittgenstein pensait que, quel que soit l'individu, s'il enseigne correctement la philosophie, ce n'est que par miracle, par un "effet essentiellement secondaire" selon l'expression de Jon Elster.
"Certains états mentaux et sociaux semblent avoir pour propriété de ne pouvoir se réaliser qu'en tant qu'effets secondaires d'actions entreprises à d'autres fins." (Jon Elster, Le laboureur et ses enfants, p. 17)
Il s'agirait de miracle, car ces effets sont inattendus et _donnés_. Par qui ? Ne nous hâtons pas de trouver un complément d'agent du passif à ce qu'il convient d'appeler une grâce...
"On dit que les bonnes choses de la vie sont gratuites : en fait, on pourrait dire que les bonnes choses de la vie sont des effets essentiellement secondaires. Comme le suggère Albert Hirschman dans ses travaux récents, cela pourrait être dû au fait que les effets secondaires n'ont pas de "potentiel de désillusion", puisque nous n'en attendons rien pour commencer." (Jon Elster, op. cit. p. 98)
Certes logiquement on peut comprendre la phrase comme adressée au seul Norman, mais vue l'habitude qu'avait Wittgenstein de dissuader ses élèves de se lancer dans des carrières philosophiques, on peut à bon droit donner à cet avertissement une portée générale. Quant à honnêtement, vous le remplacez par correctement, ce qui ne va pas de soi : on peut faire x correctement (efficacement) mais pas honnêtement et inversement. Correctement suggère que le miracle est dans la réception (l'élève comprend ce qu'est la philosophie grâce à l'enseignement). Honnêtement laisse penser que le miracle est dans l'émission (on reste intègre, honnête en enseignant la philosophie). On peut alors se demander s'il est vraiment requis d'éclairer le passage par le concept d'effets qui ne deviennent réels que s'ils ne sont pas intentionnels. Cela voudrait donc dire qu'on ne parvient vraiment à enseigner la philosophie que si on ne veut pas l'enseigner. Mais dans ce cas, ne devrait-on pas soutenir que c'est strictement impossible d'enseigner la philosophie correctement (si on accepte votre substitution) ? Je crois que ça se défend si on pense à la morale : c'est impossible d'enseigner la morale en la disant, on la montre par notre manière d'être. Ceci dit et si on remplace correctement par honnêtement, l'idée - une parmi d'autres bien sûr - ne pourrait-elle pas être qu'à enseigner la philosophie comme il est habituel de le faire (exposé des systèmes contradictoires) on n'est pas en mesure d'avoir l'intégrité morale qui va de pair chez Wittgenstein avec l'élucidation théorique des problèmes philosophiques ? Je le répète : c'est une hypothèse que je pourrai faire dans une conversation mais qui dans nos conversations écrites court le risque de passer pour beaucoup plus assurée qu'elle n'est
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- soit Wittgenstein estimait que Malcolm était tellement nul et non avenu en philosophie que seul un miracle lui permettrait de l'enseigner correctement,
Quant à honnêtement, vous le remplacez par correctement, ce qui ne va pas de soi : on peut faire x correctement (efficacement) mais pas honnêtement et inversement.
Correctement suggère que le miracle est dans la réception (l'élève comprend ce qu'est la philosophie grâce à l'enseignement).
Honnêtement laisse penser que le miracle est dans l'émission (on reste intègre, honnête en enseignant la philosophie).
On peut alors se demander s'il est vraiment requis d'éclairer le passage par le concept d'effets qui ne deviennent réels que s'ils ne sont pas intentionnels. Cela voudrait donc dire qu'on ne parvient vraiment à enseigner la philosophie que si on ne veut pas l'enseigner. Mais dans ce cas, ne devrait-on pas soutenir que c'est strictement impossible d'enseigner la philosophie correctement (si on accepte votre substitution) ? Je crois que ça se défend si on pense à la morale : c'est impossible d'enseigner la morale en la disant, on la montre par notre manière d'être.
Ceci dit et si on remplace correctement par honnêtement, l'idée - une parmi d'autres bien sûr - ne pourrait-elle pas être qu'à enseigner la philosophie comme il est habituel de le faire (exposé des systèmes contradictoires) on n'est pas en mesure d'avoir l'intégrité morale qui va de pair chez Wittgenstein avec l'élucidation théorique des problèmes philosophiques ?
Je le répète : c'est une hypothèse que je pourrai faire dans une conversation mais qui dans nos conversations écrites court le risque de passer pour beaucoup plus assurée qu'elle n'est