Dans Le Monde du 6 février cet extrait d'un article d'Edward Hadas intitulé Franck Obama se laisse griser par son désir de plaire.
" Les hommes politiques aiment être populaires. Vu sous cet angle, le projet de Barack Obama de plafonner à 500 000 dollars (389 000 euros) les rémunérations des dirigeants d’entreprises renflouées par l’argent public est une idée géniale. Mais vue sous à peu près n’importe quel autre angle, la décision du président des Etats-Unis est une catastrophe.
De fait, si l’on confiait la question des indemnisations des patrons à un philosophe de l’Antiquité, il pourrait établir une limite de ce type."
De fait, si l’on confiait la question des indemnisations des patrons à un philosophe de l’Antiquité, il pourrait établir une limite de ce type."
Commentaires
Je crois qu’il faudrait relier cet aspect qui prend incontestablement une responsabilité religieuse avec l’idée d’une critique de la démocratie délibérative dans le fil d’un perfectionnisme qui vient en droite ligne, en fait, d’Emerson.
Il y a autre chose qu'un parfum de sagesse antique. Nous sommes au coeur de ce qu'est la philosophie, du chox de ce qu'est une vie, n'est-ce pas ?
Je ne me sens pas en mesure de déterminer ce qui est au coeur de la philosophie ; en revanche le lien que vous faites entre le perfectionnisme et la vertu gréco-romaine m'amène à la question suivante : est-ce légitime d' utiliser le concept de perfectionnisme pour caractériser les philosophies grecques comme l'épicurisme, le stoïcisme, le scepticisme ?
Je note que la pensée d'Obama se réfère à Dieu même si l'idée que l'Amérique est près de Dieu semble remplacée par celle qu'elle en est encore loin, d'où cette référence humble au besoin de perfectionnement (est-ce d'ailleurs justifié d'exclure la dimension téléologique ? Que la liberté de l'homme soit patente n'enlève pas l'idée que les fins humaines ne sont pas pensables dans l'immanence mais par référence à une transcendance qui fixe aux peuples et aux hommes des buts. )
1) absence de référence à un Dieu personnel et créateur.
2) indépendance et auto-suffisance de la philosophie.
3 ) absence de référence à une collectivité (ici l'Amérique) à laquelle on se réfère autant en termes d'origine (les fondateurs, la Constitution), de devenir (que sommes-nous donc devenus ?) et de fin (où devons-nous aller ?). Les sagesses hellénistiques visent une fin individuelle (sans préjuger des rapports que l'individu qui cherche à être sage devra entretenir avec les autres)
4) absence de prise en compte d'un temps excédant la durée de la vie humaine (en revanche penser l'histoire de l'Amérique en termes de progrès possible dans une évolution de longue durée se rattache partiellement à la philosophie des Lumières, entre autres à Kant qui pense le progrès historique comme possible mais non nécessaire cf par exemple l'opuscule "Idée d'une histoire universelle d'un point de vue cosmopolitique" )
La sagesse antique a donc un parfum complexe, pour reprendre votre image.
- Un moment pré-chrétien
- Un moment chrétien (et post-chrétien)
Cavell, à mon avis, a choisi à dessein le terme de "perfectionnisme" pour unir ces deux moments (Dans la liste des auteurs perfectionnistes, il y aussi bien Aristote [L'éthique à Nicomaque] que Matthew Arnold.)
Là j'ai l'impression de me relier à l'inspiration la plus antique de la philosophie.
2) La philosophie comme éducation est une expression trop vague. S'il s'agit de l'éducation dogmatique transmise dans les écoles épicurienne, stoïcienne, même sceptique (!) etc, c'est clair qu'on a fait trop de chemin pour y revenir. S'il s'agit de l'éducation non comme transmission de doctrines mais comme apprentissage de la clarification conceptuelle, afin que chacun ait entre autres l'idée la plus précise et la plus exacte possible des différends doctrinaux et choisisse ce qui lui convient en connaissance de cause, oui alors. Mais cela suppose que les doctrines philosophiques ne sont pas scientifiques, car on ne choisit pas ce qui nous convient dans les sciences. Si sur un problème philosophique donné une argumentation philosophique est absolument contraignante, on peut se demander si on n'a pas alors retranché un problème de l'ensemble des problèmes philosophiques. On peut penser qu'il y a des problèmes qui sont irréductiblement philosophiques et que d'autres le sont jusqu'à plus ample informé.