Dans l'entretien avec Robert Menasse publié dans Le Monde du 15-03-19, l'écrivain autrichien rappelle le danger de voir l'histoire comme un roman :
" La disparition des derniers témoins du génocide des juifs, dont il est beaucoup question dans « La Capitale », affaiblit-elle l’idée européenne ?
On peut au moins en discuter. La crainte que personne ne puisse plus témoigner de ces crimes, que ces atrocités finissent par prendre, aux yeux de certains, une dimension aussi mythologique que la guerre de Troie, aussi lointaine que les guerres puniques, cette crainte est bien réelle. L’un des symptômes s’observe par la légèreté grandissante avec laquelle l’extrême droite se comporte à l’égard de cette histoire, considérant qu’elle ne la concerne pas, multipliant les critiques contre la prétendue « massue du fascisme » toujours brandie contre elle, etc. Elle affiche une attitude de plus en plus désinvolte et cynique face à ces événements. Autant de signes que les vérités, les enseignements, les conséquences qui en ont été tirés ne sont plus vraiment pris au sérieux. Bien sûr, cette situation est liée à la disparition des derniers témoins.''
Certes que les sciences historiques ne produisent pas de simples récits ne signifie pas que la connaissance historique n'est pas en mesure de progresser.
On trouve dans le même entretien un passage que les indépendantistes catalans devraient méditer, surtout ceux de la CUP ou de l' ERC, quand ils pensent que l'indépendance et la république en Catalogne pourraient permettre de commencer sur ce territoire une authentique politique de gauche, voire d'extrême-gauche :
" On a pu croire, après la chute du mur de Berlin, à la fin prochaine de l’ère de l’Etat-nation. Or la nation jouit d’un regain de faveur tandis que l’Europe devient impopulaire. Pourquoi, selon vous ?
Dans notre monde toujours plus globalisé, beaucoup éprouvent la nostalgie d’une identité plus petite, notamment celle que propose l’Etat-nation. Mais l’Etat-nation crée-t-il une identité commune ? Qu’ai-je donc en commun, moi Viennois, avec un Tyrolien, bien que nous soyons tous deux autrichiens ? Pas même la langue (j’ai beaucoup de mal à comprendre l’allemand du Tyrol !). Bien sûr cela ne m’empêche nullement de nouer des liens individuels d’amitié avec des Tyroliens, mais aussi avec des habitants du Péloponnèse. Je suis avant tout un citadin et, en Autriche, Vienne est la seule ville qui vaille.
Le succès présent du nationalisme vient de la promesse de protection que la nation porterait. Or c’est une illusion, une fausse solution aux problèmes d’aujourd’hui, car l’Etat-nation a perdu sa fonction protectrice, même en France ou en Allemagne. La mondialisation n’est rien d’autre que le battage en brèche des souverainetés nationales et le marché ne se soucie nullement des frontières. Regardez l’évasion fiscale…''
Le succès présent du nationalisme vient de la promesse de protection que la nation porterait. Or c’est une illusion, une fausse solution aux problèmes d’aujourd’hui, car l’Etat-nation a perdu sa fonction protectrice, même en France ou en Allemagne. La mondialisation n’est rien d’autre que le battage en brèche des souverainetés nationales et le marché ne se soucie nullement des frontières. Regardez l’évasion fiscale…''
C'est cette illusion nationaliste qui explique pourquoi même des anarchistes peuvent à l'intérieur de la CUP militer paradoxalement pour la naissance d'un État catalan souverain.
Commentaires
Il est intéressant d'étudier le cartésianisme empirique des Hollandais au XVIIème siècle. Il apportera de l'eau au moulin des éclectiques cousiniens, pour refonder la philosophie en psychologie, à partir du Cogito cartésien compris dans un sens spiritualiste.
Outre l'averroïsme, Descartes a pratiqué l'alchimie en Hollande, grâce aux Rose-Croix (voir la Correspondance, "Les météores" de 1637 et la quatrième partie des "Principes de la philosophie"). Dans "Le Songe de Descartes", Jacques Maritain était allé très loin sur cette piste. Les Rose-Croix étaient luthériens, si bien que Descartes fut également soupçonné d'avoir versé dans le protestantisme.
À vrai dire, Descartes se mit presque tout le monde à dos, et c'est un miracle qu'il ait pu survivre !
Avec les Alchimistes, Descartes a rencontré le matérialisme stoïcien. Les Néo-stoïciens Juste Lipse et Guillaume du Vair avaient servi de passeurs entre la philosophie stoïcienne et l'alchimie. Les travaux de Bernard Joly, dans "La Rationalité de l’alchimie au XVIIe siècle", montrent bien l'alchimisation de la physique stoïcienne. Le Pneuma igné des Stoïciens, ce souffle matériel de l'Âme du monde qui traverserait la matière pour l'animer, deviendra le feu ou la lumière de l'esprit du monde, pour les Alchimistes. L'Âme du monde comme Nature ouvrière, génératrice et conservatrice, intéressa également les philosophes arabes. Les Médiévaux avaient tenté de l'identifier au Saint-Esprit.