lundi 27 janvier 2020

Greguería n°278

" Miro con melancolía los bancos de piedra del jardín porque en una misma tarde pueden pasar de bancos a tumbas."
" Je regarde avec mélancolie les bancs en pierre dans le jardin car dans une même après-midi, de bancs ils peuvent se transformer en tombes."

dimanche 26 janvier 2020

Greguería n° 277

" Lo malo es cuando el amor del hombre pierde la erre."
Littéralement traduite, la greguería donne en français :
" Le problème, c'est quand l'amour de l'homme perd son r."
Amo en effet veut dire maître. On peut alors tenter cette approximation :
" Le problème, c'est quand la flamme de l'homme perd son f."
Certes le meurtre implique la domination mais la réciproque n'est pas vraie....

Amour de la Caverne.

" Devant les cosmos humides, tendres, pleins de sèves et de courbes, me revient l'idée très simple que la vue est soutenue par le toucher, le toucher par l'ouïe, l'ouïe par le goût, que la réalité est faite de cet équilibre de concordances où Pascal situait le sol véritable de la certitude " écrit Louis Althusser le 21 août 1942 dans son Journal de captivité (Stock/Imec, 1992, p.103)

vendredi 24 janvier 2020

Greguería n° 276

" Los que compran un Buda comienzan a entrar en el Nirvana."
" Ceux qui achètent un bouddha commencent à entrer dans le Nirvana."

jeudi 23 janvier 2020

Greguería n° 275

" Los grandes supervivientes de una época de guerra son como esas hojas que se secaron en el árbol y no acaban de caer."
" Les grands survivants d'une période de guerre sont comme ces feuilles qui ont séché sur l'arbre sans pour autant tomber."

mercredi 22 janvier 2020

Greguería n ° 274

" Cuando los perros se miran en el agua se creen hombres con barba."
" Quand les chiens regardent leurs reflets dans l'eau, ils se prennent pour des hommes avec une barbe."

mardi 21 janvier 2020

Greguería n° 273

" Esas casitas cerradas en medio de la soledad de la valle son como libros muertos."
" Ces maisonnettes fermées au milieu de la solitude de la vallée sont pareilles à des livres morts."

Égorgement et vérité.

Comme Pascal a eu tort d'écrire : " Je ne crois que les histoires dont les témoins se feraient égorger." !

lundi 20 janvier 2020

Greguería n° 272

" Decía : " Me duele el gran almirante ", y es que le dolía el colon."
" Elle disait : " J'ai mal au grand amiral ", et c'est au colon qu'elle avait mal."
Vu que le verbe dire (decir) n' a pas ici de pronom personnel, seule la misogynie que j'attribue à Ramón, au vu de greguerías jusqu'à présent non traduites, justifie que je féminise le sujet.

Allégorie de la caverne à la façon sceptique : la chute des philosophes-escargots.

Le héros de l'histoire qui suit vient d'aller se coucher :
" Déjà (j') inclinais vers l'inconscience, quand un imperceptible bruit, net, cependant, comme une châtaigne tombant à terre, me tira de ma somnolence. Je n'y attachais d'autre importance dans le moment. Un second coup, après un instant de silence où seuls montaient et descendaient, en se croisant à des points fixes, les souffles de mes compagnons, me réveilla un peu plus (...) Pour vous dire le vrai (...), je n'en dormis de la nuit. Pendant six heures que dura mon supplice, je dénombrai 98 chocs, exactement semblables, toujours à de longs intervalles (...) J'eus au repas l'explication de mes terreurs nocturnes. On nous servit des escargots. L'hôtesse les avait déposés dans la chambre haute, sous un bahut : pour qu'ils ne s'enfuyassent pas, elle les avait tenus fermés dans un gros carton. Je compris tout (...) et vous me comprenez !! Ces admirables bêtes cherchaient comme nos philosophes une issue vers le ciel : ellle grimpaient aux parois et s'empilaient, coquille en bas, sous le couvercle du carton. La première se fixait ferme, et eût tenu sans les autres qui l'escaladant à renverse faisaient une grappe qui, cédant d'un coup, tombait en faisant le bruit qui m'intrigua si fort." (Louis Althusser, Journal de captivité, Stock/Imec, 1992, p. 173)
Platon avait raison : c'est seul que le prisonnier pouvait sortir de la caverne. Il fut bon aussi que les autres prisonniers le tuassent. Sans ce meurtre, l'histoire interminable de la philosophie aurait été possible.

Commentaires

1. Le vendredi 24 janvier 2020, 13:06 par gerardgrig
On ne connaît pas de grand livre sur la philosophie française en Oflag. Les plus grands esprits y ont séjourné. Il est vrai que cette captivité reste honteuse, d'autant que ces philosophes n'ont lu que de la métaphysique allemande. Seul Maxime Chastaing faisait de la résistance en lisant Virginia Woolf.
2. Le dimanche 26 janvier 2020, 12:27 par Philalèthe
Les camps dont vous parlez ne sont-ils pas la Caverne au centuple ? Pouvoir y écrire quoi que ce soit sur la Caverne, n'est-ce pas déjà presque héroïque ?
" Journée finie, fatigue, repas, sommeil. Liberté d'esprit  des urbains grecs inconcevable avec le travail dur. Esclavage nécessaire." écrit  Althusser  dans son journal le 20 avril  1941.
En somme il a fallu à  Platon des esclaves  réels pour avoir le loisir de faire la théorie  de l'homme-esclave...
3. Le dimanche 26 janvier 2020, 18:25 par gerardgrig
Il est intéressant de voir comment Althusser, philosophe chrétien féru de platonisme, commence à s'intéresser aux masses, sous la forme de l'analogie avec un tas d'escargots, et au rapport de l'individu à la communauté. Ici, l'individu dans son rapport à la communauté, c'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase. D'autres penseurs ont vécu la captivité différemment, comme Henri Maldiney, dans "In Media Vita", qui était déjà phénoménologue, et qui faisait ses exercices merleau-pontyens.
4. Le lundi 27 janvier 2020, 09:35 par Philalèthe
Si Althusser était mort en captivité, lisant son journal, on aurait dit : " Quel grand moraliste ou quel grand poète il aurait fait ! ".