C’est par la vie de Théodore que Diogène Laërce conclut la partie du livre II consacrée aux Cyrénaïques. En tout, bien peu de lignes, desquelles se dégage confusément le portrait d’un homme persécuté par les autorités. Exilé de Cyrène, chassé d’Athènes, condamné (par qui ? où ?) selon Amphicratès, à boire la ciguë, tel un deuxième Socrate. Mais pourquoi donc ? Il semble avoir défié les pouvoirs. Après avoir rapporté l’anecdote racontant comment il se fait piéger par Stilpon, Diogène le montre accusant d’impiété un prêtre :
« Théodore, un jour qu’il s’était assis auprès du hiérophante Euryclidès (c’est le prêtre qui initie aux mystères), lui demanda : « Dis-moi, Euryclidès, quels sont ceux qui se montrent impies à l’égard des mystères ? » Euryclidès ayant répondu : « Ceux qui les dévoilent aux non-initiés », « Donc toi aussi tu es impie, dit Théodore, puisque tu les expliques à des non-initiés. » Et en vérité peu s’en fallut qu’il ne fût conduit à l’Aéropage (où il aurait été jugé), si Démétrios de Phalère ne l’avait tiré de là. » (II, 101)
A lire ce texte, la première impression est que Théodore, berné auparavant par Stilpon ( cf la note du 09-12-05), se venge sur Euryclidès en jouant aussi sur l’ambiguïté d’une expression : « dévoiler aux non-initiés » peut être autant une transgression que l’accomplissement d’un devoir, tout dépendant du sujet de l’action en question. Il semble donc que le hiérophante manque de répartie quand il en appelle à la « Haute Cour de Justice » pour trancher le différend. Mais je préfère croire que le prêtre est plus judicieux qu’il ne paraît et, par le même mouvement, Théodore plus subversif que son raisonnement, à première vue grossier, ne le laisse penser. En effet Euryclidès a compris à demi-mot qu’a travers cette accusation un peu déplacée Théodore sous-entend que, si les prêtres sont institués par la cité pour dévoiler les mystères, en réalité ils n’en ont pas les capacités car à l’image de n’importe qui, ils ont une idée fausse du divin. Bien qu’autorisé à dévoiler le mystère, le hiérophante est en réalité aussi peu légitimé que l’imposteur qui se ferait passer pour lui, dans la mesure où l’un comme l’autre sont enfermés dans le brouillard des préjugés religieux.
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