mercredi 1 avril 2009

In memoriam canium (6): Anaximène de Lampsaque.

A Lara R. qui m'a aidé, entre autres, pour une traduction.
A ne lire que Diogène Laërce, on ne penserait pas qu'Anaximène de Lampsaque appartienne à l'école cynique. On ne lui attribuerait en effet que trois propriétés, précisément l'éloquence, l'obésité et la capacité à s'indigner:
" Diogène s'approcha de l'orateur Anaximène qui était obèse et lui dit: "Donne-nous un morceau de ton ventre, à nous les mendiants. Toi, tu te sentiras plus léger et nous, tu nous rendras service". Un jour que cet orateur prononçait un discours, Diogène brandit un hareng saur et détourna les auditeurs. Devant l'indignation d'Anaximène, il dit: "Un hareng saur d'une obole a mis fin au discours d'Anaximène" (DL VI 52 éd. Goulet-Cazé)
A propos de la deuxième anecdote, on relèvera que la description que Diogène fait de la situation ne ridiculise Anaximène et son discours qu'au prix d'être tout à fait incorrecte. Rectifiée ("Diogène brandissant un hareng saur a détourné d'Anaximène ceux qui l'écoutaient "), elle réduit Diogène à un trublion et laisse intacte la question de la valeur des paroles prononcées...
Les textes que livrent Martin García et Macías Villalobos dans Los filósofos cínicos y la lilteratura serioburlesca (Akal/Clásica 2008) donnent à Anaximène une identité plus riche et plus intéressante.
Lui aussi professeur d'Alexandre le Grand, comme Aristote et Philiscos, il a écrit une Rhétorique à Alexandre et une Histoire grecque(semblable en cela à Onésicrite). Ces textes sont bien sûr perdus mais on doit au doxographe Stobée (5ème siècle) quelques citations qui retiennent l'attention (je les traduis de la traduction espagnole):
" Nous avons l'habitude d'appeler hasard ce qui dans la vie a été mal calculé par les hommes, parce que si nous dirigions tout correctement avec notre esprit, le nom de hasard n'existerait pas" (II, 8, 17)
" Les riches n'ont pas l'habitude de s'apitoyer autant sur les malheureux que les pauvres , car ceux-ci compatissent aux malheurs des autres parce qu'ils craignent qu'ils ne leur arrivent." (IV, 33, 21)
" Les plaisirs affaiblissent les vieillards intelligents autant qu'ils développent chez eux en sens contraire les désirs des argumentations et leur fournit une plus grande fermeté pour dire ce qui est utile aux autres et l'entendre d'eux. Ainsi donc on peut voir que les plaisirs qui viennent de la nourriture, de la boisson et du sexe ne les satisfont pas tant sur le moment qu'ils ne les affligent après. En revanche le plaisir de l'argumentation et la connaissance les satisfont immédiatement et disposent ceux qui apprennent, à être bien disposés pour le reste de leur vie" (IV 50, 91)

Commentaires

1. Le mardi 19 mai 2009, 21:23 par gould
Hello!
J'aimerais ajouter une petite remarque: la Rhétorique à Alexandre n'a jamais été confirmée comme ayant été écrite par Anaximène. Même si des travaux récents font douter de son attribution à Aristote, comme on l'a longtemps crû, la paternité de l'ouvrage n'en revient pas néanmoins à Anaximène. Veuillez m'excuser pour cette remarque mais je n'ai pu m'empêcher de rectifier.
Bonne semaine!
Aurélien.
2. Le mardi 19 mai 2009, 23:21 par philalethe
Merci beaucoup pour cette rectification.

dimanche 29 mars 2009

In memoriam canium (5): chiens cyniques, chiens bactriens, chiens de Priam.

Dans l’histoire du cynisme, il y a deux Onésicrite.
Du premier, citoyen d’Egine, rien à dire sinon qu’il était le père de Philiscos et qu’au lieu de détourner ses deux fils de Diogène il s’est comme eux soumis à lui (Diogène Laërce VI 75).
Le second, Onésicrite d’Astypalée, disciple aussi de Diogène, mérite en revanche plus d’ attention ; certes je lui ai déjà consacré un billet mais il est à compléter.
On pourrait commencer par remarquer qu’à la différence de Diogène il n’ a pas éconduit Alexandre le Grand mais l’a conduit, comme Philiscos, à sa façon cependant.
En effet, d’après Plutarque (Vie d’Alexandre 66 3), il était le pilote en chef de ceux qui dirigeaient la flotte macédonienne vers l’Inde. Arrien (Indica 18 9) le fait même pilote du navire d’Alexandre. En outre il a rédigé une chronique de ce voyage en Inde, cependant autant Arrien que Strabon l’ont jugé porté à l’exagération, voire menteur.
Le philosophe-chien a rapporté de là-bas de bien étranges choses, que Pline reprendra dans son Histoire Naturelle (VII 28) comme par exemple l’existence d’hommes à cinq coudes et à quatre paumes de la main. En revanche pas de traces qu’il ait mentionné un usage relatif à des chiens et qui se prête aisément, on le verra, à un usage symbolique.
C’est Strabon qui en fait état (je traduis le texte de l’espagnol à partir de la version qu’en donne l’édition García-Villalobos- vol 1 p.458-)
« Anciennement, pour sûr, les Sogdiens et les Bactriens ne différaient pas beaucoup des nomades dans le mode de vie et les coutumes, bien que celles des bactriens soient un peu plus civilisées. Mais ceux qui suivent Onésicrite ne racontent pas ce qui est chez eux le plus singulier : en effet, ceux qui succombent à la vieillesse ou à la maladie ils les jettent vivants à des chiens spécialement élevés à cette fin, que dans leur langue maternelle ils appellent croque-morts (sepultureros). Le côté extérieur de la muraille de la capitale des Bactriens est propre mais la majeure partie de l’intérieur est pleine d’os humains. Alexandre mit fin à cette coutume » (Géographie XI 11 3)
A la différence des chiens de Priam qui dévorent leur maître par faute de la guerre et du bouleversement qu’elle introduit, les chiens bactriens sont dressés pour dévorer les humains, par cela plus proches des chiens cyniques qui eux aussi ne faisaient qu’une bouchée de tous ceux qui, à leurs yeux, étaient porteurs des stigmates de la mauvaise conduite.

samedi 28 mars 2009

In memoriam canium (4): Philiscos d’Egine

Ce billet est tout d’abord l’occasion de saluer la publication en espagnol de deux volumes qui constituent une précieuse anthologie de textes antiques sur les cyniques (Los filósofos cínicos y la literatura moral serioburlesca José A. Martin Garcia & Macías Villalobos ed. Akal Madrid 2008). Je l’explore aujourd'hui afin de donner un peu de corps à Philiscos d’Egine, que j'ai seulement évoqué en frère aîné incapable de faire revenir son jeune frère au domicile paternel tant il était comme lui sous le charme de Diogène.
On peut commencer par relier Philiscos de deux manières à la tragédie. D’abord parce que Diogène aurait composé une tragédie ayant Philiscos pour titre (Diogène Laërce VI 79), ensuite parce qu' il n’aurait pas été seulement le disciple conquis de Diogène mais aussi selon Satyros l’auteur des tragédies qu’on attribue au maître. Marie-Odile Goulet-Cazé soutient cependant que « les tragédies étaient certainement des ouvrages de Diogène » (éd. des Vies p.746). C’est l’avis de García et Villalobos pour lesquels on a attribué à Philiscos les tragédies de Diogène afin de donner une image du maître libérée du poids des positions scandaleuses que Diogène y aurait soutenues (ibid vol. 1 p.430). En effet,d’après Laërce VI 73, dans une de ses tragédies, Thyeste, Diogène aurait défendu l’anthropophagie. Il y a donc quatre possibilités selon que le Philiscos de la tragédie est ou non Philiscos d’Egine : ce dernier aurait écrit une tragédie ayant ou lui-même ou un homonyme comme personnage principal ou bien Diogène aurait consacré une tragédie à un disciple ou à un homonyme de son disciple. Dans les quatre cas cela reste étrange.
En revanche, d’après Simone Follet, Philiscos serait bel et bien l’auteur des vers inscrits sur la statue de bronze érigée, après la mort de Diogène, en son honneur, par ses concitoyens :
« Même le bronze subit le vieillissement du temps,
mais ta renommée, Diogène, l’éternité ne la détruira point.
Car toi seul as montré aux mortels la gloire d’une vie
Indépendante et le sentier de l’existence le plus facile à parcourir » (Laërce VI 78)
Philiscos aurait écrit aussi des dialogues philosophiques, la Souda cite le titre de l’un d’entre eux Codrus et Garcia et Villalobos rapportent une citation de lui faite par Stobée:
« Il est impossible, insensé, que ceux qui n’ont pas fait d’efforts reçoivent ce qui revient à ceux qui ont fait des efforts » (III 29 40 ibid. p.435) - on notera la contradiction entre l'éloge de l'effort ici et la référence à la facilité du sentier dans les vers cités plus haut.
Enfin Garcia et Villalobos m’apprennnent – mais sans mentionner la source – que Philiscos aurait été le professeur de grec d’Alexandre le Grand.
Qui imaginera un dialogue où Aristote et Philiscos devisent sur les mérites de leur illustre élève ?
En tout cas, qu’il s’appelle Diogène ou Philiscos, le cynique a à coeur de donner des leçons à Alexandre.

vendredi 27 mars 2009

Diogène de Sinope: réussir à être quelqu'un en n'étant pourtant plus personne aux yeux des autres.

"Certains disent que Diogène mourant ordonna qu'on le jetât en terre sans sépulture afin que n'importe quelle bête sauvage pût prendre sa part, ou qu'on le poussât dans un trou et qu'on le recouvrît d'un peu de poussière (selon d'autres, il demanda qu'on le jetât dans l'Illissos) afin qu'il fût utile à ses frères." écrit Laërce en VI 79.
Le texte est allusif mais il est permis d'identifier les bêtes sauvages et les frères aux chiens. Or, on mesure mieux à quel point Diogène s'oppose aux valeurs grecques traditionnelles si on sait que chez Homère le pire de ce qui peut arriver à un cadavre est précisément d'être déchiré par les chiens. Ainsi quand Priam évoque devant Hector sa mort dans Troie assiégée, il dit:
" Moi-même, le dernier, les chiens, à la porte extérieure, sanguinaires, me déchireront, quand quelqu'un, avec le bronze aigu, m'ayant frappé de près ou de loin, aura ôté la vie à mes membres; ces chiens que j'ai nourris dans mon palais, portiers vivant de ma table, et qui, ayant bu mon sang, le coeur enragé, resteront couchés devant les portes (...) Quand c'est la tête blanchissante, le menton blanchissant, les parties d'un vieillard égorgé qu'outragent les chiens, il n'y a rien de plus pitoyable chez les misérables mortels" (L'Iliade XXII 74-76 traduction Lasserre)
Certes il y sans doute ici un double outrage du fait que Priam imagine être dévoré par ses propres chiens. A ce propos, Jean-Pierre Vernant écrit:
" C'est le monde à l'envers qu'évoque Priam, toutes les valeurs sens dessus dessous, la bestialité installée au coeur du foyer domestique, la dignité du vieillard tournée en dérision dans la laideur et l'impudicité, la destruction de tout ce qui dans le cadavre appartient proprement à l'homme." (L'individu, la mort, l'amour p.1349 Oeuvres II)
Cependant la honte est déjà totale même si les animaux anthropophages sont sauvages. Le chant I de l'Iliade évoque dès la première ligne cette horreur:
" Chante la colère, déesse, du fils de Pélée, Achille, colère funeste, qui causa mille douleurs aux Achéens, précipita chez Hadès mainte forte âme de héros, et fit de leurs corps la proie des chiens et des oiseaux innombrables"
C'est contre une telle mort infâme que Priam met en garde Hector en le suppliant de ne pas affronter Achille:
" S'il te tue, plus moyen même de te pleurer sur un lit, cher rejeton, pour moi qui t'enfantai, ni pour ta femme, riche de cadeaux. Fort loin de nous, près des vaisseaux argiens, les chiens rapides te dévoreront." (Chant XXII)
Ce que Vernant commente ainsi:
" L'outrage porte ici l'horreur à son comble. Le corps est mis en pièces en même temps que dévoré tout cru au lieu d'être livré au feu, qui, en le brûlant, le restitue dans l'intégralité de sa forme à l'au-delà. Le héros dont le corps est ainsi livré à la voracité des bêtes sauvages est exclu de la mort en même temps que déchu de la condition humaine. Il ne franchit pas les portes de l'Hadès, faute d'avoir eu sa "part du feu"; il n' a pas de lieu de sépulture, pas de tertre ni de sèma, pas de corps funéraire localisé, marquant, pour le groupe social, le point de la terre où il se trouve situé, et où se perpétuent ses rapports avec son pays, sa lignée, sa descendance, ou même simplement les passants. Rejeté de la mort, il se trouve du même coup rayé de l'univers des vivants, effacé de la mémoire des hommes. Davantage, le livrer aux bêtes, c'est le dissoudre dans la confusion, le renvoyer au chaos, à une entière inhumanité: devenu, dans le ventre des bêtes qui l'ont dévoré, chair et sang d'animaux sauvages, il n'y a plus en lui la moindre apparence, la moindre trace de l'humain: il n'est strictement plus personne." (ibidem p.1357)
Si Diogène le cynique demande cette mort infâme, ce n'est pas pour ne plus être personne mais pour illustrer à quel point il enlève toute valeur au groupe social et à ses usages. L'entière humanité consiste désormais à ne plus identifier ce qu'on est à ce que le regard du groupe juge qu'on est. Mais on sait qu'il y a une autre mort de Diogène plus conforme aux usages.

mercredi 25 mars 2009

Voir dans les choses autre chose que de simples choses: vice ou vertu ?

Devenir stoïcien implique remettre les choses à leur place, les séparer de toutes leurs connotations, les réduire à leur matérialité neutre. Par exemple, comme l'écrit Marc-Aurèle, ne voir dans un mets précieux que le cadavre d'une bête, dans un vin rare que des raisins écrasés. On pourrait identifier là un appauvrissement de la perception, une renonciation paradoxale à la capacité d' estimer finement les nuances et les contextes. Mais ce que je souhaite souligner aujourd'hui, c'est l'extrême difficulté de l'exercice non pas en lui-même et intemporellement mais en relation avec l'image des choses qui accompagne ce que Jean-Pierre Vernant appelle dans L'individu, l'amour, la mort (1989) "le corps présocratique".
Lisons par exemple ces lignes où les armures sont essentiellement autre chose que des pièces métalliques travaillées d'une certaine manière:
" Les puissances qui, pénétrant le corps, opèrent sur sa scène intérieure pour le mouvoir et l'animer trouvent hors de lui, dans ce que l'homme porte ou manie: vêtements, protection, parure, armes outils - des prolongements permettant d'élargir le champ de leur action et d'en renforcer les effets. Prenons un exemple. L'ardeur du menos brûle dans la poitrine du guerrier; elle brille dans ses yeux; parfois, dans des cas exceptionnels où elle est portée à incandescence, comme chez Achille, elle flamboie au-dessus de sa tête. Mais c'est elle encore qui se manifeste dans l'éclat éblouissant du bronze dont le combattant est revêtu: montant jusqu'au ciel, la lueur des armes qui provoque la panique dans les rangs ennemis est comme l'exhalaison du feu intérieur dont le corps est brûlé. L'équipement guerrier, avec les armes prestigieuses qui disent la carrière, les exploits, la valeur personnelle du combattant, prolonge directement le corps du héros; il adhère à lui, s'apparente à lui, s'intègre à sa figure singulière comme tout autre trait de son armorial corporel." (Oeuvres II p.1318)
La tâche de l'élève stoïcien est donc multiple: défaire la chose des corps environnants, l'abstraire de sa fonction, en faire quasi une réduction physicaliste. En guise d'entraînement lire Homère comme un bêtisier, comme le catalogue de toutes les projections délirantes, de toutes les associations confuses.
Reste que, stoïcisme mis à part, les descriptions homériques sont peut-être, phénoménologiquement parlant, fort perspicaces.

mardi 24 mars 2009

Le garçon de café stoïcien.

Les Stoïciens opèrent une réduction des choses à leurs constituants objectifs afin de les détacher de toutes les propriétés qui font courir le risque à celui qui les reconnaît de perdre le contrôle de lui-même.
Ainsi un garçon de café stoïcien devrait réduire un pourboire à une quantité de métal.
En effet, vu qu’on ne peut pas passer de « ce pourboire n’est pas très généreux » à « cette quantité de métal n’est pas très généreuse », la mesquinerie des clients le laisserait impassible. Cependant s’il opérait une telle réduction systématiquement, il ne pourrait pas accomplir sa fonction sociale comme il se doit, ce à quoi s’oblige pourtant tout stoïcien. Par exemple remercier le client généreux (ce qu’on attend de tout garçon honoré d’un pourboire généreux) implique l’identification de ce qui est laissé par le client comme pourboire généreux.
Le garçon de café stoïcien paraît donc condamné à un va-et-vient entre réduction et identification coutumière. L’identification coutumière serait requise chaque fois qu’elle conditionnerait l’accomplissement correct de la tâche (ainsi dans un grand restaurant le serveur malhabile qui souillerait la nappe de gouttes de vin ne devrait pas réduire les traces à des modifications chimiques) ; en revanche la réduction serait impérative chaque fois qu’elle conditionnerait le contrôle de soi. Il y a alors une tension forte entre les deux attitudes car le contrôle de soi professionnel va dans le sens inverse du contrôle de soi éthique, vu que la réduction dessert le premier et sert le second.
On peut résoudre à première vue la contradiction en envisageant que le garçon de café fasse comme s’il reconnaissait la valeur du pourboire, comme s’il avait honte d’avoir taché la nappe etc. On peut cependant se demander dans quelle mesure ne pas tenir pour vraies les croyances inhérentes à l’exercice d’une profession n’est pas un obstacle à l’exercice en question. Entre quelqu’un qui joue au garçon de café et un garçon de café, il n’y a pas peut-être pas seulement la différence intérieure qu’on pourrait apprécier variablement selon qu’on reconnaît ou non la valeur des habitus, il y a peut-être aussi différence objective dans l’accomplissement de la fonction ( peut-on désirer faire quelque chose sans tenir pour vraies toutes les croyances qui justifient le faire en question ?).

" A la grecque !!" de Guillaume Clayssen

Guillaume Clayssen me dit avoir trouvé entre autres dans la lecture des textes que j'ai consacrés à Diogène Laërce l'idée de faire monter sur scène les philosophes antiques. Il est vrai que les plus exhibitionnistes d'entre eux, les Cyniques, font quelquefois un sacré théâtre.
Cette idée est devenue une oeuvre, qui par son titre doublement exclamatif et peut-être ainsi à mi-chemin entre nostalgie et ironie évoque une façon de faire, un style, un art de vivre - même s'il doit y avoir maintes manières de vivre et de penser "à la grecque".
J'invite donc mes quelques lecteurs, épisodiques ou fidèles, à se rendre au théâtre de Suresnes pour y assister à l'oeuvre de Guillaume Clayssen.

vendredi 13 mars 2009

Marc-Aurèle vu par Carla Bruni-Sarkozy.

Carla Bruni parlant de Nicolas Sarkozy:
"En ce moment il est plongé dans "Les mots" de Sartre, Alexandre Dumas et les "Pensées" de Marc-Aurèle qui sont très intéressantes puisque c'était un empereur philosophe." (source: Le Figaro Madame)
Problème: puisqu'il était un esclave philosophe, Epictète a-t-il eu des pensées intéressantes ?

Commentaires

1. Le mercredi 8 avril 2009, 16:30 par Arnaud
Absurde, en effet, même si l'on devine bien où elle veut en venir. Le terme "intéressant" aurait en l'espèce une connotation "utilitariste" et réflexive (au sens de spéculaire plutôt que de spirituel)...
2. Le vendredi 8 janvier 2010, 21:10 par M.A.
Il se peut aussi que Sarkozy soit, sans que nous le sachions, un esclave... de Carla ?
3. Le dimanche 10 janvier 2010, 11:37 par philalèthe
Il faudrait déjà qu'on sache déterminer à partir de quel degré une dépendance devient un esclavage ! L'appréciation semble largement personnelle.
Reste que pour de nombreux philosophes antiques - entre autres les épicuriens - liberté de l'esprit et amour ne peuvent pas coexister. En revanche l'esclavage au sens juridique n'impliquant pas une dépendance sentimentale, il est compatible avec la liberté de l'esprit. D'où la référence à Epictète, esclave philosophe.

mercredi 11 mars 2009

Socrate et la bourgeoisie hostile au Front Populaire.

C'est une remarque datée, tirée d'un livre fondamental, écrit pendant la 2ème guerre mondiale; elle offre, pour comprendre Socrate, une contextualisation et une comparaison inhabituelles.
"Le parti pris laconisant qui régnait dans les milieux réactionnaires d'Athènes, celui par exemple où vécut Socrate, est aussi fort que celui que la bourgeoisie française des années du "Front Populaire" manifestait en faveur de l'ordre et de la puissance mussoliniennes."
L'auteur est Henri-Irénée Marrou dans son Histoire de l'éducation dans l'Antiquité (Points Seuil p.52).

samedi 7 mars 2009

Éthique torera / éthique existentialiste.

Francis Wolff formule dans sa Philosophie de la corrida "les dix commandements du torero pour être torero". Voici le premier commandement:
"L'éthique "torera" est une éthique de l'être. Son premier commandement énonce donc:
Tu seras torero, c'est-à-dire tu seras d'abord, toujours, et absolument conforme à ton office.
Autrement dit: ton "être torero" précède, détermine et valorise tes actes de torero, même lorsque tu n'es pas en train de les accomplir, et même si tu les accomplis mal." (p.170)
Ce commandement exemplifie parfaitement une éthique essentialiste. C'est l'inverse de l'existentialisme. En termes sartriens, le torero est de mauvaise foi, il illustre l'esprit de sérieux, c'est un lâche.