" Les animaux émettent des cris de douleur, et les enfants, avant de savoir parler, peuvent exprimer la rage, l'inconfort, le désir, la délectation, et toute une gamme de sentiments par des cris et des roucoulements de divers types. Un chien de berger émet des ordres à l'intention de son troupeau par des moyens qu'il est difficile de distinguer de ceux employés par le berger. Entre ces bruits et la parole, on ne peut pas tracer de limite précise. Quand le dentiste vous fait mal, il se peut que vous émettiez un grognement involontaire : cela ne compte pas comme parole. Mais s'il dit : "Dites moi si je vous fais mal", et que vous produisiez exactement le même son, ce dernier devient une parole, plus encore, une parole de l'espèce destinée à transmettre une information. Cet exemple illustre le fait que, dans le langage comme à d'autres égards, il y a une gradation continue de comportement animal à celui de l'homme de science le plus pointilleux, et des bruits pré-linguistiques à la diction étudiée du lexicographe" (La connaissance humaine, sa portée, ses limites, 1948, trad. de Nadine Lavant, 2002, p.94, Vrin)
Le 5 Avril 1951, Wittgenstein écrit :
" Je veux considérer l'homme ici comme animal ; comme un être primitif à qui l'on accorde l'instinct, mais non le raisonnement. Comme un être dans un état primitif. Car nous n'avons pas avoir honte d'une logique qui suffit à un moyen de communication primitif. Le langage n'émerge pas du raisonnement." (475, De la certitude, trad. de Danièle Moyal-Sharrock, 2006, Gallimard)
" Ich will den Menschen hier als Tier betrachten ; als ein primitives Wesen, dem man zwar Instinkt, aber nicht Raisonnement zutraut. Als ein Wesen in einem primitiven Zustande. Denn welche Logik für ein primitives Verständigungsmittel genügt, deren brauchen wir uns auch nicht zu schämen. Die Sprache ist nicht aus einem Raisonnement hervorgegangen"