Sénèque poursuit ainsi la huitième lettre à Lucilius:
"Rectum iter, quod sero cognovi et lassus errando, aliis monstro. Clamo: “Vitate quaecumque vulgo placent, quae casus adtribuit: ad omne fortuitum bonum suspiciosi pavidique subsistite. Et fera et piscis spe aliqua oblectante decipitur. Munera ista fortunae putatis ? Insidiae sunt. Quisquis vestrum tutam agere vitam volet, quantum plurimum potest, ista viscata beneficia devitet, in quibus hoc quoque miserrimi fallimur : habere nos putamus, haeremus. In praecipitia cursus iste deducit : huius eminentis vitae exitus cadere est. Deinde ne resistere quidem licet, cum coepit transversos agere felicitas, aut saltim rectis aut semel ruere : non vertit fortuna, sed cernulat et allidit."
" Le droit chemin, que j’ai connu tard et fatigué d’errer, je le montre aux autres. Je leur crie : « Evitez tout ce qui plaît à la foule, tout ce que le hasard attribue : devant tout bien fortuit, soupçonneux et craintifs, tenez bon. La bête sauvage, le poisson sont abusés par une espérance qui les charme. Vous pensez que ce sont des faveurs de la fortune ? Ce sont des pièges. Quiconque parmi vous veut mener une vie sûre, qu’il fuie autant qu’il le peut ces bienfaits qui sont comme de la glu et sur lesquels, très misérables nous nous trompons à la pensée aussi que nous les avons alors qu’ils nous tiennent. Une telle course mène à des précipices : l’issue de cette vie élevée est la chute. En plus il n’est même pas permis, quand la félicité commence à pousser de travers, de couler au moins droit ou tout d’un coup: la fortune non seulement renverse mais culbute et fracasse."
Trois remarques:
1) Sénèque n' appelle pas ceux auxquels il s'adresse à autre chose qu'à rester soupçonneux et craintifs (pavidi) devant les biens qui ont la faveur de la foule. S'il ne les exhorte pas à être sûrs d'eux et impavides, c'est qu'il a affaire à des progressants.
2) L'animal représente ici ce que l'homme ne doit pas être, mais il n'est pas rare que dans le cadre du stoïcisme l'animal soit analysé comme un modèle de l'homme; comme le dit Goldschmidt (1953) , " le devoir chez l'animal est parfait d'emblée" (Le système stoïcien et l'idée de temps 1985 p.127). Mais à vrai dire autant la bête sauvage que le poisson accompliraient parfaitement leur devoir, c'est-à-dire vivraient selon la nature, si les chasseurs ne leur tendaient pas des appâts. Les hommes de la foule sont ainsi clairement identifiés à des bêtes chassées. Mais qui sont les chasseurs ? Les opinions fausses ?
3) En quelques lignes trois métaphores s'enchaînent: être malheureux, c'est être pris - par le chasseur -, tomber de haut et être fracassé par la tempête. Sénèque ne nie pas cependant la possiblité pour l'homme de la foule de faire l'expérience du bonheur (felicitas): l'espérance du plaisir (spes oblectans) tient en partie ses promesses, on monte en effet très haut (vita eminens), mais comme un vent qui brutalement détourne de la route qu'on veut suivre (transversos agere), l'enchaînement des faits incontrôlés produit la ruine (la dernière ligne de ce passage doit être méditée par les spéculateurs fous).
1) Sénèque n' appelle pas ceux auxquels il s'adresse à autre chose qu'à rester soupçonneux et craintifs (pavidi) devant les biens qui ont la faveur de la foule. S'il ne les exhorte pas à être sûrs d'eux et impavides, c'est qu'il a affaire à des progressants.
2) L'animal représente ici ce que l'homme ne doit pas être, mais il n'est pas rare que dans le cadre du stoïcisme l'animal soit analysé comme un modèle de l'homme; comme le dit Goldschmidt (1953) , " le devoir chez l'animal est parfait d'emblée" (Le système stoïcien et l'idée de temps 1985 p.127). Mais à vrai dire autant la bête sauvage que le poisson accompliraient parfaitement leur devoir, c'est-à-dire vivraient selon la nature, si les chasseurs ne leur tendaient pas des appâts. Les hommes de la foule sont ainsi clairement identifiés à des bêtes chassées. Mais qui sont les chasseurs ? Les opinions fausses ?
3) En quelques lignes trois métaphores s'enchaînent: être malheureux, c'est être pris - par le chasseur -, tomber de haut et être fracassé par la tempête. Sénèque ne nie pas cependant la possiblité pour l'homme de la foule de faire l'expérience du bonheur (felicitas): l'espérance du plaisir (spes oblectans) tient en partie ses promesses, on monte en effet très haut (vita eminens), mais comme un vent qui brutalement détourne de la route qu'on veut suivre (transversos agere), l'enchaînement des faits incontrôlés produit la ruine (la dernière ligne de ce passage doit être méditée par les spéculateurs fous).
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