Dans Lettrines (Corti, 1967), Julien Gracq écrit :
" Renan : en lisant les pages (sans doute aux yeux de la science d'aujourd'hui très fragiles et très incomplètes) qu'il consacre à la critique des Évangiles, on songe malgré soi au tri génial, à la sûreté infaillible dans la distribution des ombres et des lumières, au chef d'oeuvre de clair-obscur dont nous sommes redevables à un demi-siècle de tradition orale. La figure ailée, parfaite, on dirait qu'une loi non écrite la condamne à ne jaillir du cocon qui l'a incubée que lorsque tous ses traits matériels s'y sont consommés jusqu'au dernier : en ce sens le Christ réalise intégralement dans sa légende le " Meurs et deviens " de Goethe : l'érosion de ce qui mérite pleinement ici d'être appelé son enveloppe mortelle est totale : pas un mot chez les évangélistes sur sa taille, sa voix, la couleur de ses cheveux. À une époque où on écrivait et dessinait beaucoup plus, Jeanne d' Arc échappe aussi très étrangement au piège du portrait et même de la plus vague description - mais son siècle était le dernier où pareille chose fût possible : Gutenberg était né, et les temps finissaient pour jamais peut-être où la figure humaine avait chance d'aborder à sa quatrième dimension."
Ce billet est écrit dans l'esprit d'un précédent.
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