jeudi 27 février 2020

Greguería n°306

" Las ostras son de rústica peña por fuera, pero por dentro son de la más fina porcelana.''
" À l'extérieur, les huîtres sont de rudes rochers mais à l'intérieur elles sont la porcelaine la plus délicate."

mercredi 26 février 2020

Greguería n°305

" El fracaso se debe a que el mundo se renueva incesantemente y hemos llegado tarde."
" L'échec est dû à ce que le monde se renouvelle sans cesse et que nous sommes arrivés tard."

mardi 25 février 2020

Greguería n°304

" En Carnaval los tuertos tienen los dos ojos... Por eso es un gran día de fiesta para ellos. "
" À Carnaval, les borgnes ont les deux yeux... Aussi est-ce un grand jour de fête pour eux."

Commentaires

1. Le mardi 25 février 2020, 13:49 par gerardgrig
Ramón nous livre une conception utopique du carnaval, qui rachèterait tout pour tout le monde. Dans un carnaval, il y a des fautes contre la logique, la vraisemblance ou le goût, qui ne passent pas. Dans les Pieds Nickelés de Pellos, les trois compères doivent se déguiser, et ils échangent des vacheries sur le déguisement improbable qu'aurait chacun. À Filochard le borgne, on lui dit qu'il serait mal venu qu'il se déguise en Godefroi de Bouillon, parce qu'un bouillon qui n'aurait qu'un oeil serait une faute culinaire.
On pourrait aussi dire que ce genre de remarque attire le mauvais œil.
2. Le jeudi 19 mars 2020, 08:54 par Philalèthe
Ce généreux Carnaval peut être vu aussi comme l'allégorie du maquillage de nos stigmates.

lundi 24 février 2020

Greguería n°303

" Dad a los hombres que además de pobres son borrachos, limosna para que se emborrachen, porque es ese el mejor dinero de caridad que se les puede dar...¿ Se comprende lo que sería vivir ochenta años, victima de la desigualidad, hijo de la caridad, sosteniendo la salud y un espiritu claro y evidente ? Que mueran jóvenes y alcoholizados, que tenga alguna exaltación su vida de camino a la muerte."
À la différence des précédentes greguerías, extraites de Total de greguerías (1962), celle-ci est publiée en 1922 (Greguerías selectas, Casa Editorial Calleja, Madrid, p. XXXIV). Entre ces ces deux éditions (il y en eut bien d'autres entre-temps), il y a une différence manifeste : dans le premier ouvrage, les greguerías peuvent couvrir plusieurs pages, comme celle sur les jambes des femmes (p. 79 à 86). En revanche, toutes celles du dernier recueil de greguerías du vivant de Ramón sont très courtes et c'est sous la forme brève qu'elles sont passées à la postérité.
" Aux hommes qui en plus d'être pauvres sont des ivrognes, donnez l'aumône pour qu'ils s'enivrent, parce qu'en argent c'est la meilleure offrande qu'on peut leur donner... Ne comprend-on pas ce que serait vivre quatre-vingts ans pauvre, victime de l'inégalité, rejeton de la charité, en essayant de garder la santé et un esprit clair et lucide ? Qu'ils meurent jeunes et ivres, que la vie qui les conduit à la mort ait quelque exaltation ! "

Commentaires

1. Le lundi 24 février 2020, 22:17 par gerardgrig
Ramón s'essaie à la provocation et au paradoxe en ce qui concerne la pauvreté. Il y a eu le "Salauds de pauvres !" de Marcel Aymé et le "Assommons les pauvres !" de Baudelaire. Là, nous avons droit à une vie d'esthète, que l'on brûle par les deux bouts, pour mourir jeune et faire un beau cadavre. Il vaut mieux rêver avec Ramón, car dans les faits tout revient au même. Avec une vie de mendiant clochard, on ne va pas jusqu'à quatre-vingts sans ! Il y a aussi une forme de fraternisation anarchiste du bohème madrilène, qui bamboche sans souci du lendemain, avec le clochard à qui il souhaiterait d'avoir le même sort que lui.
2. Le jeudi 19 mars 2020, 08:59 par Philalèthe
Droguez ceux que vous ne pouvez pas soigner !

dimanche 23 février 2020

Greguería n° 302

" Si te conoces demasiado a ti mismo, dejarás de saludarte."
" Si tu te te connais trop, tu cesseras de te saluer. "

vendredi 21 février 2020

Greguería n°301

" El rey cree que su calavera es de marfil y ningún cortesano se atreve a pronunciar la palabra " hueso "."
" Le roi croit que son crâne est en marbre et aucun courtisan n'ose prononcer le mot " os "."

Commentaires

1. Le vendredi 21 février 2020, 14:22 par gerardgrig
Ramón semble rendre hommage à "L'homme de cour" de Gracián. On pense aussi surtout aux "Habits neufs de l'empereur" d'Andersen, qui affirmait d'ailleurs que son conte avait des origines espagnoles. Il y a sans doute encore un tropisme espagnoliste dans cette gregueria. Néanmoins, dans le domaine cognitif, les médecins ont découvert un syndrome des habits de l'empereur. On ne sait pas si le courtisan agit par égoïsme, ou s'il y a chez lui un défaut de morale épistémique.
2. Le vendredi 21 février 2020, 22:26 par Philalèthe
Je l'ai choisie pour sa dimension presque universelle !

jeudi 20 février 2020

Greguería n°300

" Entierro : ruido de caballos con zapatos nuevos."
" Enterrement : bruit de chevaux et chaussures neuves."

mercredi 19 février 2020

Greguería n°299

" Aligerad la pesadumbre de la muerte. Decid al saber la muerte de un amigo : " Otro que se ha ido al colegio en el que volveremos a ser condiscípulos."
" Allégez le fardeau de la mort. Quand vous apprenez la mort d'un ami, dites : " Encore un qui est allé à l'école où nous serons de nouveau condisciples."

lundi 17 février 2020

Greguería n°298

" Maquina de tren filosófica : esa que se pasea sola por las vias marginales."
" Locomotive philosophique : elle déambule, sans wagons, le long des voies secondaires."

La science, les illusions et les raisons d'agir.

Dans Recherche d'une église (1934), Jules Romains met dans la bouche du normalien Jallez les réflexions suivantes :
" (...) Pour faire n'importe quelle chose, il faut y attacher un minimum d'importance. Napoléon croyait qu'il était très important de dominer l' Europe. Hugo croyait qu'il était très important que son nom fût répété dans trois mille ans. Le croyaient-ils, oui ou non ? Hein ? Il me semble que ça ne fait pas de doute. C'est parce qu'ils croyaient très fort qu'ils ont dépensé une si prodigieuse énergie. Or tu n'as qu'à écrire sur le passé, à côté des chiffres qui mesurent l'ambition de Napoléon et celle de Hugo, deux ou trois mesures astronomiques. Ça suffit. Dès qu'on ne croit plus à l'importance des buts, il ne reste plus qu'un ressort pour agir : le besoin d'oublier notre néant, comme dit Pascal, ou si tu préfères un dilettantisme désespéré. Tu me diras aussi le simple plaisir d'agir, sans réfléchir plus loin ? Peut-être. Mais je doute qu'on puisse agir aussi longtemps sans se faire des réflexions qui équivalent à : " Mon but est important. Aujourd'hui où je me sens fatigué, je vais tout de même donner un coup de collier, parce que ça en vaut la peine." À ce moment-là, si ta pensée a pris la mauvaise habitude de te rappeler à l'oreille l'âge moyen des étoiles rouges, tu es fichu ; je veux dire que tu te mets à fumer des cigarettes dans ton fauteuil. Et le plus grave, c'est que tu n'as aucun sentiment d'infériorité, ah ! mais non ! Personne ne réussira à t'intimider en te disant : " Regardez les autres. Est-ce qu'ils sont assez bêtes pour s'occuper de l'âge des étoiles rouges ? Ils en ont entendu parler comme vous. Vous n'êtes pas le seul à avoir passé votre dernière partie de baccalauréat. Mais eux, ça ne les a pas troublés." Exactement comme si tu étais mouton de boucherie, dans un wagon de la Vilette, mais mouton clairvoyant, et qu'on te dise : " Quoi ! Vous êtes tout triste parce que vous pensez qu'on vous abattra cet après-midi ? Quelle drôle d'idée de se tourmenter d'avance ! Regardez vos copains, ça ne les trouble pas..." Tu n'as pas passé par une période comme ça ?
Jerphagnion ne répondit pas tout de suite. Ses paupières battaient. Puis il dit :
- ... J'ai pensé ces choses-là, naturellement. Mais pas au point d'en être affecté. Et maintenant je me demande pourquoi. On est bien forcé d'avouer que si on se met en face de ces pensées-là, et qu'on les laisse agir sur soi, on doit réagir comme tu as fait. Le seul moyen d'y échapper, c'est de ne pas rester en face. Oui, il faut ou les ignorer à fond, comme le bougnat du coin, ou les recueillir distraitement, comme un écolier apprend la liste des sous-préfectures... Alors quoi ? Suis-je léger, moi aussi ? Suis-je de ces types dont nous parlions un jour, dont tu parlais plutôt, sur qui les idées glissent ? Évidemment, il faut vivre et on s'habitue à tout. Je pense à l' astronome de l'Observatoire qui, en ce moment-ci, l'œil à son équatorial, est en train de se ronger le foie, parce que son collègue vient d'avoir, à sa place, une promotion de deux cents francs. Celui-là est vacciné contre l'infini... Mais, moi, je n'ai pas l'excuse de l'être... Oh ! je sais bien qu'il y a une noble réponse.
- Laquelle ?
- Celle de Pascal, justement... que la véritable grandeur est de l'ordre immatériel, donc résiste à tous les écrasements par comparaison. Qu'un beau vers, ou qu'un trait d'héroïsme est quelque chose d'incommensurable au volume des nébuleuses ou à l'âge des étoiles rouges.
- Oui, mais retire de l'ambition de Napoléon la croyance que la surface de l'Europe est quelque chose d'important. Dès qu'on ne croit plus qu'aux grandeurs immatérielles, honnêtement, sans tricher, est-ce qu'on travaille encore beaucoup ? Est-ce qu' on " en met " comme ceux qui croient aussi aux matérielles ? On accepte de se distraire, peut-être, mais est-ce qu'on " produit " ? Tu vois le sens que je donne au mot ? Je le prends dans ce qu'il comporte d'abondant, de courageux, de tenace. Produire : couvrir un morceau d'espace autour de soi avec des choses solides, qui ne sont pas là pour vous divertir seulement, mais pour valoir par elles-mêmes, et pour durer. Ce qui exige un effort très dur, à continuer même les jours où l'on a la flemme, ce qui suppose surtout des compromissions avec la matière, et l'idée que les temps, les espaces terrestres ne sont pas négligeables. Si on les tient pour négligeables, on écrira peut-être un court poème mystérieux. Ou quelques maximes. On fignolera une statuette d' ivoire. Ou bien l'on participera d'un œil désabusé à des conférences de diplomates, en prenant plaisir à brouiller les cartes, à compliquer les parties. Mais on ne bâtira pas l'Acropole. On ne fera pas La Légende des Siècles. On ne fondera pas un empire." (Les hommes de bonne volonté, Robert Laffont, 1988, p. 1095-1096)

dimanche 16 février 2020

Hypothèse assassine.

Dans Les vices du savoir (2019), Pascal Engel analyse la foutaise, en anglais bullshit et pose cette question :
" La philosophie française postmoderne est-elle du bullshit ? " (Agone, p.389)
L'auteur ne répond pas explicitement, cependant une note associée à la question met dans la bouche d'un autre philosophe une réponse particulièrement cruelle :
" G. A. Cohen inclut parmi les discours de foutaise typique celui des intellectuels français et soutient que la raison pour laquelle il y en a tant en France vient du fait qu'on y enseigne la philosophie au lycée."
La cruauté de la thèse de Cohen, qu'on peut au moins reprendre comme hypothèse, est facile à identifier : les professeurs de philosophie au lycée défendent souvent (mais y croient-ils vraiment ?) leur enseignement comme une exception française d'un prix inestimable. En effet une de ses finalités est d'armer l'élève intellectuellement en lui donnant et la capacité d'argumenter rationnellement et celle de repérer et de combattre les opinions, les idéologies en nourrissant son esprit critique. On peut même alors aller jusqu'à penser que la philosophie arme le citoyen contre les abus et l'emprise des pouvoirs politique, médiatique etc.
La thèse de Cohen, très iconoclaste, attristante aussi pour qui a consacré sa vie à un tel enseignement, affirme que, loin de minimiser le bullshit, l'enseignement de la philosophie en Terminale le maximiserait. Parlerait à l'appui de la position de Cohen le fait que l'institution scolaire, ayant l'ambition de produire en 9 mois, des centaines de milliers de petits philosophes, doit bien en persuader à tort quelques milliers qu'ils en sont. Il est vrai aussi que les meilleures copies de philosophie écrites par des élèves de Terminale n'ont rien de la foutaise et peuvent aller jusqu'à impressionner par leur valeur le correcteur, même expérimenté. Ce sont ces élèves et ces copies qui permettent aux professeurs de philosophie en Terminale de continuer à croire, malgré la difficulté de cet enseignement, dans la valeur de leur métier. Certes, de telles copies sont rares et beaucoup de dissertations entrent dans la catégorie du sous-bullshit, si on me permet l'expression, la raison en étant qu'elles n'ont pas un niveau de français suffisant, pour avoir l'effet engageant et séducteur de la foutaise, effet sans lequel on chercherait sans doute moins à l'analyser et à la neutraliser, comme on le fait d'un sophisme ravageur.
Cela dit, même si Cohen a raison, la condition de la foutaise française qu'il met en relief, ne suffit sans doute pas à expliquer ce qu'il dénonce. Dans cette logique, il faudrait identifier aussi et entre autres deux facteurs post-bac : d'une part, des enseignements visant le développement de la rationalité dans le domaine des idées mais et n'atteignant leur but que pour une minorité (alors classes prépas, Universités, grandes écoles pourraient avoir leur part dans cette malheureuse responsabilité) et d'autre part des enseignements visant explicitement la production de bullshit (à chacun ici de faire sa liste). Rendons d'ailleurs ici justice à Pascal Engel qui, loin de se centrer sur le lycée, aide son lecteur à évaluer sans indulgence et l' Université et le journalisme.
En tout cas, Platon dans la République avait clairement affirmé que l'enseignement de la philosophie à de jeunes esprits court le risque de produire le contraire de ce qu'il vise : non l'acquisition d'une pensée rationnelle mais le renforcement par la sophistication de la pensée irrationnelle.

Commentaires

1. Le lundi 17 février 2020, 11:55 par angela cleps
Notre ami Pascal Engel a souvent cité ce propos de Jerry Cohen,
et s'en est distancé. Il notait entre autre que les anglophones produisent, malgré un enseignement de la philo uniquement à l'université, autant de bullshit que les français, et même bien plus
car leur masse est plus grande.
voir son article " un bilan de la philosophie analytique en France"
publié dans les Actes du colloque La normativité , presses de l'U.
de CAen 2001. et sur divers sites de l'auteur.

Mais si l'on interprète charitablement Cohen, il ne dit pas que la philo médiatique est causée par l'enseignement de la philo au lycée. Il dit que le fait que tout le monde croit avoir accès à la philo du moment qu'elle est une matière du curriculum renforce l'emprise des media. Et là il n'a pas tort. Car les media ont pris
le pouvoir partout, y compris sur l'enseignement de la philosophie.
2. Le mardi 18 février 2020, 17:51 par Philalèthe
Merci pour ces précisions.
Avant ou après le bac, l'enseignement de la philosophie, qu'il soit analytique ou continental, génère peut-être de la foutaise. Mais est-ce évitable ? Certes l'enseignement des maths n'engendre pas des pseudo-mathématiciens car la frontière y est nette entre l'objectif et le subjectif mais dans les arts, en philo, voire dans les sciences humaines, c'est problématique de trouver les critères permettant de distinguer faire correctement de ne pas faire correctement ! Or, même si le bullshiter ne croit pas faire de la philo par exemple, son succès a comme condition que son public croie qu'il en fait correctement.
3. Le mercredi 19 février 2020, 13:17 par gerardgrig
Puisque je reprends des études à l'Université, dans un bain très idéaliste (Poitiers), je demande la permission d'user à titre provisionnel d'un "bullshit empirico-transcendantal". L'inconvénient de la notion de foutaise, c'est qu'elle est trop large et qu'elle risque de s'inclure elle-même. Faut-il brûler les derniers métaphysiciens ? Karl Popper affirmait que la science a toujours besoin de la métaphysique, et que les erreurs de celle-ci sont constructives.
4. Le mercredi 19 février 2020, 13:32 par Philalèthe
Mais, cher Gérard Grig, la foutaise n'est pas nécessairement métaphysique et la métaphysique pas nécessairement foutaise ! Je ne crois pas non plus qu'il suffit de formuler des hypothèses infalsifiables au sens poppérien pour être un bullshiter et on doit même pouvoir être un bullshiter tout en formulant des énoncés falsifiables.

vendredi 14 février 2020

Greguería n° 297

" En Hollywood hay una ley por la cual si en un film la mujer da una bofetada a un hombre, en otro tiene que ser el hombre el que dé la bofetada a la mujer."
" À Hollywood il y a une loi selon laquelle si dans un film une femme gifle un homme, dans un autre film l'homme doit gifler la femme."

Commentaires

1. Le vendredi 14 février 2020, 16:30 par gerardgrig
Ramón découvre une forme de loi des compensations dans le cinéma d'Hollywood, qui est le reflet de la société américaine. Il y aurait peut-être un désir de faire justice dans la guerre des sexes. À la même époque, dans le cinéma français, les baffes pleuvaient sur les dames, comme dans "Touchez pas au grisbi". Dans la mentalité française, il y a peut-être aussi cette recherche d'équilibre, mais en compensant une légendaire courtoisie par l'idée bizarre qu'en majorité les femmes giflées l'ont cherché, parce que dans le fond, tout le monde mérite ce qui lui arrive.
2. Le jeudi 19 mars 2020, 09:01 par Philalèthe
Moins compensation que revanche de l'homme, la greguería ne devant pas être lue à l'envers.

jeudi 13 février 2020

Greguería n°296

" Queria saber el tipo de sangre de las morcillas, por si era o no el que le correspondía."
" Il voulait connaître le groupe sanguin du boudin, pour savoir s' il était ou non compatible avec le sien."

mercredi 12 février 2020

Greguería n° 295

" Los árboles con un agujero en el tronco son como caballos de los toros a los que clavó un cuerno un toro extraviado."
" Les arbres avec un trou dans le tronc sont comme des chevaux de corrida dans lesquels un taureau égaré a enfoncé une corne."

mardi 11 février 2020

Greguería n°294

" Esas damas que aparecen con guantes negros hasta más arriba del codo es que quieren parecerse a la Venus de Milo como si tuviesen cortados los brazos."
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" Si certaines femmes se montrent avec des gants noirs jusqu'au-dessus du coude, c'est qu'elles veulent ressembler à la Vénus de Milo, comme si elles avaient les bras coupés."

Commentaires

1. Le mercredi 12 février 2020, 00:26 par gerardgrig
On peut s'interroger sur le sens de la sensualité sophistiquée des gants de femme noirs au-dessus du coude, qui sont associés au déguisement, ou au fétiche quand ils sont retirés avec une lenteur calculée. L'explication de Ramón est très séduisante. Elle fait penser au type d'associations d'un dandy amateur d'art, qui ne sera jamais artiste, comme Charles Swann chez Proust, qui ne voit les femmes que dans l'optique de l'art, pour les idéaliser. Mais Swann applique aussi le procédé à son cocher Loredan, qui ressemble à un buste de Doge. Le long gant noir rehausse la femme. Le bas résille fait le contraire, en l'assimilant à un poisson pris dans un filet.
2. Le jeudi 19 mars 2020, 09:17 par Philalèthe
Oui, mais ici c'est le personnage qui intentionnellement encourage la perspective de l'esthète. D'autres greguerías comparent la femme à la statue. Statue qu'elle fait  d'elle ou qu'on fait d'elle.

lundi 10 février 2020

Greguería n°292

" Era de esas almas de Dios que cuando les van a envolver una cosa dicen que no se la envuelan. Por eso abusaba tanto de el su mujer."
" Il appartenait à ces enfants du Seigneur qui, au moment où on va emballer ce qu'ils achètent, disent que ce n'est pas la peine. C'est la raison pour laquelle sa femme abusait tant de lui."

Greguería n°293

" Lo invariable es lo que más ha variado en la vida."
" L'invariable est ce qui a le plus varié au cours du temps.'

dimanche 9 février 2020

Greguería n°291

" El amor es creer haber convencido al tiempo para que no pase."
" L' amour, c'est croire avoir convaincu le temps de ne pas passer."

samedi 8 février 2020

Greguería n°290

" Para comprender por qué se venden tanto los malos libros no hay más que fijarse que el mundo está lleno de malas corbatas que también se venden mucho."
" Pour comprendre pourquoi se vendent tant les mauvais livres, il suffit d'être attentif au fait que le monde est plein de vilaines cravates qui se vendent aussi beaucoup."

vendredi 7 février 2020

Greguería n° 289

" Hay unos seres eclipsantes que se ponen delante del que nos interesaba ver en la fotografía, y si es una estatua de rey la que ocultan, parece que se han puesto su corona."
" Il y a des êtres qui éclipsent : ils se mettent devant ce qu'on aimerait voir sur la photographie et si c'est une statue de roi qu'ils cachent, il semble qu'ils se soient mis sa couronne."

jeudi 6 février 2020

Greguería n°288

" El estudiante llega a estar tan harto de sus bartulos y sus deberes, que quisiera ahorcarse de su escuadra."
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" L'étudiant en arrive à avoir tellement assez de ses ustensiles et de ses devoirs qu'il voudrait se pendre à son équerre."

mercredi 5 février 2020

Greguería n°287

" El sueño es un pequeño adelanto que nos hace la muerte para que nos sea más fácil pasar la vida."
" Le sommeil est une petite avance que nous fait la mort pour que ça nous soit plus facile de vivre."

mardi 4 février 2020

Greguería n° 286

" El vaso servido de agua, que viene con el café, es lo más litúrgico del Café."
" Le verre d'eau qu'on sert pour accompagner le café est ce qu'il y a de plus liturgique au Café."

dimanche 2 février 2020

Greguería n°284

" La tragedia de la mujer es que se prepara para tres o cuatro viudeces y a veces no llega ni a la primera."
" Le tragique chez la femme est qu'elle se prépare à trois ou quatre veuvages mais quelquefois n'arrive même pas au premier. "

La philo comme acide.

Lisant le remarquable ouvrage de Richard Popkin, Histoire du scepticisme. De la fin du Moyen-Âge à l'aube du XIXème siècle (2003), je relève sous la plume de Bayle dans son article sur Uriel da Costa cette désespérante comparaison :
" (...) l'on peut comparer la Philosophie à des poudres si corrosives, qu'après avoir consumé les chairs baveuses d'une plaie, elles rongeroient la chair vive, & carieroient les os, & les perceroient jusqu'aux mouelles. La philosophie réfute d'abord les erreurs ; mais, si on ne l'arrête point là, elle attaque les véritez : &, quand on la laisse faire à sa fantaisie, elle va si loin, qu'elle ne sait plus où elle est, ni ne trouve plus où s'asseoir. " (Agone, 2019, p. 639)
Il plaît souvent aux élèves qu'on élimine par l'acide de la réflexion philosophique les chairs doxiques corrompues. Quelquefois ils acceptent même avec jubilation qu'il s'agisse des leurs.
Tous, leur professeur compris, rêvent de chairs philosophiques fermes, mais l'acide de la réflexion philosophique mord tous les corps philosophiques constitués.
Certes, par l'anti-acide qu'ils sécrètent, ces corps durables limitent les dégâts mais de là à trouver de quoi asseoir pour toujours la pensée... On reste alors sur le siège familier par habitude, par goût et affinité...
Mais taisons-nous ! Qui célèbre avec enthousiasme le pouvoir corrosif de l'acide est remis à sa place et surtout il en ressent vite les brûlures.

samedi 1 février 2020

Greguería n°283


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" ¿ Dónde se inspiró Goya para su ''Maja desnuda" ? Mirando las nubes, pues es la mujer acostada en una nube."
" Où Goya a-t-il trouvé l'inspiration pour sa ''Maja nue" ? En regardant les nuages, vu que la femme est couchée sur un nuage."

Commentaires

1. Le mardi 4 février 2020, 10:36 par gerardgrig
Les critiques d'art sont d'accord. C'est le contraste avec le tissu des coussins qui rehausse l'éclat de la chair de la Maja, en nous donnant l'illusion qu'elle flotte dur l'eau. C'est une Vénus sorti de l'eau, mais dans une maison de plaisir. En nous invitant à regarder les coussins, Ramón nous donne un conseil de sybarite. Il faut se concentrer sur les préliminaires lié au contexte de l'objet désiré, pour parvenir à l'acmé du plaisir.
2. Le mercredi 12 février 2020, 01:27 par gerardgrig
En attribuant un caractère éthéré de nuage à un élément du tableau, sur lequel il se concentre, Ramón tente de remédier à l'inconfort de l'universel sans concept de l'art. La Maja nue et poilue est-elle encore de la provocation pornographique, le double licencieux et dissimulé de la Maja vêtue ? A-t-elle jamais été de l'art, et si ce n'est pas le cas, pourquoi en serait-elle aujourd'hui ? Toute nudité peinte n'est-elle pas d'essence pornographique ? Las de ces questions lancinantes, Ramón regarde les nuages.
3. Le jeudi 19 mars 2020, 09:08 par Philalèthe
Ramón aime voir le naturel comme culturel et réciproquement. En plus il renverse ici le rapport fond/forme. Plus d'érotisme, et encore moins de pornographie : un ciel sur fond de femme nue.