lundi 7 novembre 2016

Aux contempteurs de la raison.

Il n'est pas rare de lire qu'il faut se méfier de la raison : elle serait par exemple trop limitée par ses principes rigides pour pouvoir accéder à la réalité dans sa souplesse et diversité, ou du moins à ce que la réalité a de plus riche ou de plus intéressant ou de plus fondamental ou de plus singulier, etc. On accuse alors ses défenseurs d' imposer la dictature de la raison et contre eux et elle, on fait appel à la liberté de l'esprit, à l'intuition, à l'imagination, à l'empathie, à la sensibilité, etc.
On tient souvent le même discours à l'égard de la vérité : elle nous enfermerait, nous ferait perdre le contact avec la réalité, nous rendrait aveugle à la complexité, etc.
La vérité est en fait qu'on peut accuser à juste titre non la raison et la vérité mais ce qui se fait passer à tort pour elles et une telle accusation ne peut être fondée sur de bonnes raisons, donc intelligible et universalisable, que si elle est conforme à la vérité et à la raison.
Épictète le disait déjà avec fermeté et clarté :
" Un de ceux qui assistaient à la leçon lui dit : "Persuade-moi que la logique est utile." Il lui répondit : "Tu veux que je te le démontre ?" - Oui - Il faut donc que je te propose un argument démonstratif ?" L'autre acquiesça et Épictète poursuivit : "Et comment sauras-tu que je ne te trompe pas par un sophisme ?" L'homme garda le silence. " Tu vois, reprit Épictète, comment tu reconnais toi-même que la logique est nécessaire, si sans elle tu n'es même pas capable de savoir si elle est nécessaire ou si elle ne l'est pas." (Entretiens, II, 25, Vrin, 2015, p.260)

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