mercredi 2 mai 2007

Digression VIII: les philosophes antiques et la grève ! (3)

Troisième épisode donc d'une fantaisie anachronique qui délaisse momentanément tout souci historique pour faire parler sur une pratique contemporaine non les philosophes antiques ressuscités mais des esprits d'aujourd'hui qui en seraient nourris...
Manière de dire que les lecteurs qui se retrouvent ici en vue de faire un exposé sur la philosophie antique doivent au plus vite passer leur chemin !
Refusant les règles du jeu collectif, le cynique, à son tour, a laissé mon lecteur en plan. Qui interpelle donc cette fois un épicurien au pas hâtif. Lequel semblant ne pas entendre la question, il doit le héler plus fort et même le prendre par la manche pour finalement l’entendre dire :
« Qui es-tu donc ? Ne sais-tu pas que je ne suis pas de ceux qu’on consulte pour les affaires politiques ? Je n’y entends rien.
Assez cependant pour savoir qu’on ne peut se livrer aux activités qu’elles impliquent sans être du même coup livrés pieds et poings liés aux désirs qui torturent ? Comment en effet réussir à défendre sa cause sans argent, célébrité, pouvoir ? Or, vois-tu, moi et les miens nous pensons que, s’il est facile de se laisser envahir par ces désirs-là, il suffit en effet de suivre le courant, il est impossible de les satisfaire. Aussi ne veux-je pas entrer dans une course sans fin, épuisante qui plus est. »
Mon lecteur, qui ne manque pas de répartie, lui rétorque :
« Mais je me suis laissé dire que vous défendez les lois car vous y voyez la garantie de votre sécurité. Ne jugez-vous donc pas bon de peser dans celles à venir ? En effet, qui vous assure qu’elles ne vous mettront pas en danger ? »
« Je vois que tu es malin et que tu veux me faire dire que l’action sur laquelle tu m’interroges, bien que collective, assurera par ses conséquences mon bien-être individuel. Mais ne sais-tu pas que moi et mes amis nous nous contentons de si peu et nous nous séparons tant des autres qu’un minimum de lois nous suffit à jamais ? Certes, si la cité nous enlevait notre propriété, abattait les murs à l’intérieur desquels notre communauté goûte le bonheur de vivre sans peine et sans souci et mettait en danger nos vies et nos biens, il nous faudrait réagir. »
« Et comment donc ? »
« Nous la fuierions, je crois, pour trouver une terre solitaire mais assez fertile pour en faire naître les biens simples et ordinaires dont nous nous réjouissons. Ou pour découvrir une autre cité assez hospitalière pour nous accueillir et assez indifférente pour nous laisser vivre entre nous !
Crois-moi ! Au nom de ton propre bonheur, renonce à vouloir faire une cité où tes mille désirs seront accomplis. Puisque malheureusement tu n’es pas assez riche pour faire de ta fortune un rempart contre les importuns et leurs soucis contagieux, convertis- toi et viens à nous ! Nous t’expliquerons plus posément que les luttes que tu envisages n’ont pas de fin et qu’à y entrer on n'en sort jamais ! »
Mon lecteur ne tirera rien de plus de ce sage désengagé et conservateur, qui ne conçoit pas que les lois puissent et doivent progresser à l’infini tant qu’elles évitent à sa communauté d' hommes simples d'être troublée par la masse des hommes affamés.

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