" Les conversations entre hommes doivent être menées à la façon des dieux, comme entre des êtres invulnérables. Le combat d'idées doit ressembler à celui qu'on livrerait avec des épées surnaturelles qui tranchent la matière sans douleurs et sans peine ; et la satisfaction est d'autant plus pure que notre adversaire vise juste. Dans ces engagements spirituels, il faut être invulnérable. " (Premier journal parisien, 30 novembre 1941)
Commentaires
Le dernier Jünger, celui du Rebelle, de l’Anarque, semblera plutôt se rapprocher de Stirner, que l’on ne classe pas dans le courant rationaliste.
Schopenhauer avait déjà traité de l'art d’ avoir toujours raison, qui nécessite d’user de rhétorique plutôt que de logique.
Le dialogue entre penseurs ne serait-il pas une action de commando spiritualisée ? On apprécie quand l’adversaire frappe juste, même s’ il nous fait mal.
Le double infernal de Jünger, dans une autre guerre, était Otto Skorzeny, le chef de commando mercenaire et balafré.
On pense aussi à l’heroic fantasy et au combat à l’ épée-laser des Jedis. Jünger était, parfois involontairement, visionnaire.
Votre idée d'une transposition au niveau spirituel d'une pratique militaire m'a rappelé ce qu'écrivait Georges Duby à propos de la posture de la prière qui était d'abord l' attitude du vassal par rapport à son seigneur...
Cela dit, ces lignes écartent complètement la possibilité de la douleur, du mal parce que le combattant d'idées ne tient à rien d'autre qu'à la vérité ; comme il n'a pas d'illusion, comme il ne se ment pas à lui-même et comme il applique le principe de Clifford ("it is wrong to believe on insufficient evidence"), la seule valeur de ses croyances est leur vérité, valeur qu'elles perdent dès que l'autre combattant fait la preuve de leur insuffisance.