" Nous avions tous les deux la passion de l'eau. Nageant côte à côte dans la fraîcheur du petit matin, nous étions séparés et unis par quelques centimètres de liquide transparent, sans le contact physique direct que Maria redoutait et que je ne désirais pas. Les courses haletantes avaient elles aussi leur signification, comme les ombres qui s'agitent dans la grotte de Platon : les véritables personnages à l'extérieur de la grotte étaient peut-être une Maria de dix ans plus jeune, moi-même de dix ans plus âgé, et tous deux sains d'esprit. Puis, tandis que nous reposions côte à côte dans l'herbe à un mètre l'un de l'autre, il y avait ces éclairs sur un visage transfiguré, presque terrifiant dans sa beauté non réalisée - éclairs de l'être véritable qui passait vivement devant l'entrée de la grotte." (Hiéroglyphes p.352 Calmann-Lévy 1955)
Commentaires
Il n'y a pas l'effort, la difficulté pour sortir de la caverne, pour assimiler le monde réel qu'était essentielle dans le texte de Platon...
Comme vous le savez, c'est à l'intérieur de la caverne que les prisonniers voient leurs ombres en croyant qu'il s'agit d'eux-mêmes.
Comme je comprends ce passage, l'être véritable n'est que l'idée de soi et d'autrui qui est imaginée à partir de l'apparence qu'on perçoit actuellement de soi ou de l'autre. Il ne peut donc faire aucun effort. En revanche on peut se demander si chacun ne doit pas faire l'effort de ne pas imaginer cet être véritable par rapport auquel il se réduit à n'être qu'une ombre.
Dans ce cas donc, "Maria" ne sortirait de la caverne qu'en oubliant son "visage transfiguré, presque terrifiant dans sa beauté non réalisée"... je me trompe?